Mona, venue d’Égypte pour une mission de service civique chez les Diaconesses de Strasbourg, a terminé son séjour. Dans cette dernière lettre de nouvelles, elle fait le bilan : des relations très fortes avec les pensionnaires de la rue Sainte-Elisabeth, un regard qui a changé sur sa vie, sa relation au temps, à la mémoire…

Mona, photographiée dans le jardin du Défap © Défap

 

 

Neuf mois se sont écoulés et me voilà en Égypte, chez moi. Maintenant, je dois écrire la dernière lettre de ma mission. Il n’est pas toujours facile d’écrire tout ce qu’on a vécu ou ressenti. Mais, l’une des leçons que j’ai apprises auprès des personnes âgées est qu’en vieillissant, on peut tout oublier. Il faut donc tout écrire et garder à jamais ce texte pour m’aider à ne pas oublier mon séjour à Strasbourg, 3 rue Sainte-Elisabeth.

Grâce à cette session retour au Défap et à la rencontre avec d’autres volontaires qui ont partagé leur expérience, j’ai pu avoir un aperçu général de tout ce que j’ai vécu au cours de mon service civique, ce qui m’a facilité la rédaction de ce texte.

Au début, la mission était un peu difficile pour moi. Être dans un pays étranger, complètement différent du mien, loin de mes proches et avec des personnes qui m’étaient inconnues. Je ne savais pas quoi faire. Je me sentais inutile, ce que je ne pouvais pas supporter. Les journées étaient très longues et les nuits courtes.

Mais au bout de quelques jours, j’ai remarqué que ces personnes essayaient de me connaître, de prendre soin de moi, de savoir ce que j’aime et ce que je n’aime pas, ce que je peux faire et ce que je ne peux pas sans me critiquer ni me juger.

Maintenant, face à cet amour et à cet accueil chaleureux, je dois aussi faire un effort, je dois faire de mon mieux. Il faut donc comprendre leur vie et en faire partie. Il faut connaître les goûts et les couleurs de chacun et chacune pour pouvoir passer du temps avec eux au quotidien, avoir des moments d’échange et de partage.

J’ai commencé à écrire chaque jour dans un cahier, qu’une sœur m’avait donné, tout ce que je découvrais sur chaque personne : qui aime sortir, lire, jouer, discuter, tricoter, … etc. Je me suis préparée alors un programme en fonction des besoins ou des disponibilités de chacun.

Le temps passait comme un torrent

Après avoir connu tout le monde et m’être rapprochée d’eux, tout a changé. Les journées devenaient très courtes. Je n’arrive pas à réaliser tout ce qui était prévu dans mon programme. Une journée ne suffisait pas pour passer du temps avec tout le monde, alors j’attendais le lendemain avec impatience pour terminer ce que je voulais faire. Le temps passait comme un torrent qui coule toujours et ne s’arrête jamais. Cette maison est devenue ma maison, cette pièce est devenue ma chambre et ces personnes font désormais partie de mes proches.

Le fait d’accompagner des personnes âgées m’a permis de devenir les yeux des malvoyants, les oreilles des malentendants, la mémoire des oublieux, les mains, les pieds, etc. Cela m’a permis d’avoir de nouveaux yeux et de nouvelles oreilles pour voir et entendre les choses différemment, de nouveaux pieds pour visiter de nouveaux endroits,…

J’ai beaucoup appris chez les Diaconesses. J’ai appris à utiliser mes mains. J’ai appris à tricoter de jolis bonnets pour les bébés, à utiliser la machine à coudre, à préparer de nouvelles recettes de gâteaux alsaciens. Grâce aux sœurs, j’ai appris que la plus haute distinction est de servir. Les actes sont plus parlants que les mots. Ce qui se fait de grand, se fait dans le silence. Il faut donner les mains pour aider et le cœur pour aimer. Il faut savoir écouter les autres pour comprendre et pas seulement répondre.

J’ai découvert différents aspects de ma personnalité en accompagnant ces personnes âgées physiquement plutôt que spirituellement. J’ai découvert que je suis une personne patiente. Je peux écouter les autres et comprendre leur tristesse ou leur joie. Je ne m’ennuie pas de faire plusieurs fois la même chose avec les mêmes personnes si ça les aide ou leur plaît.

Après la mort de quelqu’un, il ne faut pas mettre des points mais plutôt des virgules

L’une des périodes les plus difficiles que j’ai vécues au cours de ces neuf mois a été la mort de certaines personnes à la maison. Mais grâce à la vie de communauté, cette vie de prière et de partage, on peut tout surmonter, tout traverser. Comme on me l’a dit, la mort fait partie de la vie. Après la mort de quelqu’un, il ne faut pas mettre des points mais plutôt des virgules car ce n’est pas la fin mais plutôt la continuation de la vie avec le Seigneur.

Le service civique :

Le service civique m’a aidé à rencontrer de nouvelles personnes, à acquérir de nouvelles compétences sur le terrain et à avoir une perspective différente sur la vie. Faire un service civique m’a aussi permis de gagner en maturité, en autonomie et de mieux me connaître. Cela m’a permis de prendre du temps pour moi, de comprendre un peu mieux ce qui m’attire et de définir vers quoi j’aimerais me diriger.

Vacances/ Voyage/ Loisirs :

  • La Suisse : le district de la Gruyère, la Maison Cailler, la Grande Roue, le Lac Léman, des « escape games », des salles d’arcade, SENSAS Genève.
  • Eguisheim.
  • Mulhouse : l’Hôtel de Ville, le Musée Historique de Mulhouse, l’église de Saint-Étienne, La grande mosquée de El-Nour.
  • Le Grand Ballon.
  • Le Vallon de Murbach.
  • Strasbourg : La cathédrale, L’église de Saint Thomas – Saint Paul – Saint Nicolas, Concert Vivaldi (Les 4 saisons & Gloria, Promenade par Batorama, Le petit train)
  • Le Hohrodberg : C’est un centre communautaire de retraite spirituelle et de prière dans les Vosges. C’est un endroit hors du monde où vous pouvez faire une sieste du bruit de la vie et passer vos vacances ou même toute votre vie. Vous trouverez là bas, des sœurs Diaconesses qui font l’accueil, la cuisine, le ménage …etc. Des sœurs qui prient, qui chantent et qui parlent couramment le silence. Des sœurs très accueillantes, qui savent comment dire bonjour et comment dire au revoir.

Ce qui était un peu étrange pour moi en France :

  • Passer des heures et des heures à table
  • Le fromage est très important aux Français. Il peut être l’apéro, l’entrée, le plat principal et parfois le dessert.
  • Les magasins qui ferment trop tôt.
  • Le tutoiement et le vouvoiement.
  • Le fait que le nombre de bises change d’une personne à l’autre.
  • Le calme ou le silence dans les rues et le fait qu’il n’y ait pas de klaxons.
image_pdfimage_print