Le colloque « Vers une nouvelle économie de la mission » qui s’est tenu le 11 octobre 2019 au Défap a permis en premier lieu d’exprimer les diverses conceptions de la mission, et les diverses attentes vis-à-vis du Défap. Il a permis d’ouvrir des pistes de réflexion, de souligner les besoins de clarification… et il a donné lieu à la publication de deux livrets, « Paroles aux Églises » et « Actes du colloque », que vous pouvez retrouver ici, soit en téléchargement et en pdf, soit pour les commander gratuitement sous forme reliée auprès du Défap.

Basile Zouma, secrétaire général du Défap, introduisant la journée © Défap

 

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Une étape clé : c’est ainsi qu’a souvent été vécu et décrit par ses participants le colloque du Défap, organisé le vendredi 11 octobre 2019 au 102 boulevard Arago. «J’ai eu le sentiment de vivre un moment exceptionnel : j’ai vu trois présidents d’Église réunis», témoignait ainsi dès le lendemain en Conseil du Défap Christine Villard, de l’Église protestante unie de France, référente régionale Mission-Défap en PACCA. «J’ai entendu parler de mutualisation de moyens en matière d’international… Un autre mot important qui est ressorti, c’est celui de la complexité ; et il faut accepter que cette complexité, on ne la maîtrise pas.» Au cours de cette même réunion, Thomas Wild, de l’UEPAL, évoquait pour sa part un événement «très riche» dans lequel «les directions d’Église se sont impliquées». Quant à Joël Dautheville, président du Défap, il faisait part de son «sentiment qu’on a réussi à franchir un cap, qui de mon point de vue n’était pas évident». Et d’ajouter : «Je nous invite maintenant à prendre cette dynamique refondatrice, précisément comme une dynamique : c’est un élan…»

Ce colloque, intitulé : «Vers une nouvelle économie de la mission», avait d’abord pour but de permettre l’expression en un même temps et dans un même lieu des diverses conceptions de la mission, et des diverses attentes vis-à-vis du Défap, qui existent aujourd’hui au sein des trois Églises fondatrices : l’EPUdF (Église protestante unie de France), l’UEPAL (Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine) et l’Unepref (Union nationale des Églises protestantes réformées évangéliques de France). Il réunissait environ 80 participants. Il devait être suivi quelques mois plus tard, à Sète, d’un forum plus large, auquel il devait fournir de la matière et des éléments de réflexion – mais le contexte sanitaire a finalement contraint à changer de format, ce qui a donné naissance à la série de webinaires « Les Ateliers de la mission ».

D’où une journée dense, entre plénières et travaux en ateliers, entre table ronde avec les présidents des trois Églises constitutives du Défap et intervention d’un sociologue, Frédéric de Coninck, sur le thème : «Si proches et si loin les uns des autres – Quel défi pour la mission dans nos sociétés éclatées ?»… Le tout conclu par un retour sur les travaux de la journée par Frédéric Rognon, professeur de philosophie des religions à la Faculté de Théologie Protestante à l’Université de Strasbourg.

«Mission», «évangélisation», «témoignage»

Florence Taubmann, du service Animation – France du Défap, lors de la table ronde avec les trois présidents des Églises fondatrices © Défap

 

Outre les cahiers désormais disponibles, il reste de cette rencontre à la fois des images, des questionnements et des pistes de travail. L’image, tout d’abord, de Florence Taubmann, qui lors du temps d’aumônerie de la matinée a voulu placer les échanges de la journée sous le thème de la joie : «C’est joie que cette parole (…) Joie frémissante, fragile et imprenable. Joie mystérieusement inextinguible, qui résiste au mal et au malheur, au doute et aux échecs. Joie qui se chante ! (…) Notre mission frères et sœurs, c’est vraiment d’accueillir cette joie ; de vivre, porter, partager, cette joie.» Autre image, celle des deux présidents et de la présidente des trois Églises fondatrices siégeant côte à côte, à la même tribune, devant les participants du colloque, et évoquant tour à tour ce que signifiaient pour eux les mots de  «mission», «évangélisation», «témoignage», ou encore «institution». Ainsi pour Emmanuelle Seyboldt, présidente de l’EPUdF, «la mission, c’est James Bond (…) quelque chose de risqué, qui exige un fort investissement de la personne». Christian Albecker, président de l’UEPAL, a évoqué pour sa part son expérience à la tête de la mission intérieure de Strasbourg. Quant à Jean-Raymond Stauffacher, président de l’Unepref, il a souligné : «la mission est génétique pour moi», en se référent à sa famille marquée par «quatre générations de missionnaires».

Mais au-delà des Églises fondatrices avaient aussi été invités divers partenaires du Défap ; c’était le cas d’Étienne Roulet, alors président du Conseil de DM-échange et mission, qui au cours des échanges du matin avait évoqué les similitudes entre la dynamique de refondation lancée au sein du Défap, et la mue amorcée avec deux années d’avance au sein de DM, l’équivalent du Service protestant de mission pour la Suisse romande : «Nous avons eu un synode missionnaire qui a voté ce changement avec comme maître mot celui de réciprocité : mettre en lien les Églises d’ici et de là-bas pour qu’elles puissent s’entraider dans la mission, chacune sur son territoire».

Intervention de Frédéric de Coninck © Défap

 

Au chapitre des questionnements et des pistes de travail, Frédéric de Coninck a pointé les défis actuels que pose à la mission une société où «le loin est devenu proche», fait universellement admis aujourd’hui, mais où parallèlement «le proche est devenu loin», ce qui crée des difficultés et des tensions face auxquelles les outils d’adaptation manquent encore. Tout au long de sa carrière, cet ingénieur de formation, et sociologue, a su concilier sa carrière de chercheur, qui l’a amenée entre autres à travailler au sein du Laboratoire Ville Mobilité Transport (Université Paris-Est) sur toutes les problématiques de la Ville Durable… et son appartenance à une Église mennonite de région parisienne. Il se définit ainsi lui-même comme une «personne frontière», un possible point de passage ou relais d’information entre des sphères qui ne communiquent pas naturellement ; or ce sont précisément de telles «personnes frontières» qui, dès les premiers temps d’expansion du christianisme, ont su participer à sa diffusion dans les diverses sociétés méditerranéennes… À l’heure où l’on parle facilement de «mondialisation», les échos lointains de cette déjà ancienne «méditerranéisation» pourraient-ils apporter des outils pour s’adapter ?

Concluant la journée à l’issue des travaux en ateliers et des premiers retours des divers groupes, Frédéric Rognon a tenu à poser quelques jalons : «Le Défap a décidé de s’engager dans un processus de refondation et la journée d’aujourd’hui est un jalon sur cette route. Il a été demandé à plusieurs reprise de clarifier ce processus. Donc précisons : la refondation, ce n’est pas l’aggiornamento du type Vatican 2 ; ce n’est pas la tabula rasa ; ce n’est pas la restauration réactionnaire.» Mais s’il s’est refusé à fournir «une synthèse qui lierait la gerbe de manière prématurée», il a tout de même laissé aux participants quelques «biscuits». Tout d’abord, dans cette dynamique de refondation, il a souligné «la nécessité de tenir conjointement et fermement les deux pôles réalisme et utopie», de «ne verser ni dans la stricte gestion des flux, ni dans le rêve désincarné». Ensuite, se référant à Jacques Ellul, il a invité à poursuivre la route armé d’un «pessimisme rempli d’espérance». Paradoxalement, le «temps de la déréliction», ce terme par lequel Ellul désignait notre époque marquée par «la perte des repères spirituels», c’est aussi le temps approprié à l’espérance…

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