L’Assemblée du Désert, rendez-vous annuel qui se tient le premier dimanche de septembre sur les terres du musée du Désert, dans le Gard, a réuni plus de 3000 participants ce 3 septembre 2023, pour un culte et des conférences sur le thème du voyage.
Vue des participants de l’Assemblée du désert, édition 2023 © Défap
C’est l’un des hauts-lieux de la mémoire protestante en France, mais aussi un lieu de rencontres et d’échanges : l’Assemblée du Désert, qui se tient chaque année le premier dimanche de septembre, sur les terrains du musée du Désert à Mialet, dans le Gard, est tout à la fois une fête, une commémoration, une sortie familiale, un rendez-vous avec l’histoire… Un rassemblement en plein air, sous les chênes et les châtaigniers du Mas Soubeyran, en référence aux cultes clandestins que tenaient les Huguenots au temps de la persécution, entre la révocation de l’édit de Nantes en 1685 et l’édit de tolérance de 1787 ; avec des participants venus pour beaucoup des Cévennes et du Languedoc, mais aussi de toute la France et de l’étranger, et parmi lesquels on reconnaît des élus locaux, nombre de représentants d’organismes liés au milieu luthéro-réformé. Chaque année, un thème choisi en référence à l’histoire protestante donne la coloration du culte du matin, et sert de fil rouge aux conférences de l’après-midi : pour ce mois de septembre 2023, il s’agissait du thème du voyage : « Voyageurs sur la terre » (et la mer) : des huguenots au grand large.
Le Défap y était présent, aux côtés d’organismes comme l’Institut protestant de théologie (IPT), la Cimade, A Rocha, Portes Ouvertes, les éditions Olivétan ou la librairie Jean Calvin… Et ce thème du voyage a également permis d’évoquer, au cours des interventions de l’après-midi, l’ancêtre du Défap, la SMEP (Société des missions évangéliques de Paris), à travers le parcours du missionnaire et ethnologue Maurice Leenhardt. Venu participer en voisin à ce rassemblement, le pasteur Jean-Luc Blanc, ancien Secrétaire général du Défap, a également été interviewé par Jean-Luc Gadreau à l’occasion de l’émission réalisée sur place par « Solae, le rdv protestant » – magazine proposé par la Fédération protestante de France et diffusé sur France Culture, et dont vous pouvez retrouver le teaser ci-dessous.
« Des milliers d’hommes et de femmes aujourd’hui se tournent vers d’autres territoires »
Lieu lié à l’histoire, l’Assemblée du Désert a aussi son histoire propre. La première a eu lieu le 24 septembre 1911, inaugurant une tradition qui n’a été interrompue que brièvement lors des années de guerre. Elle a été un marqueur de l’engagement protestant au cours de la Seconde Guerre mondiale, avec, par exemple, le sermon prononcé par le pasteur Marc Boegner au matin du 6 septembre 1942, dénonçant la souffrance des juifs quelques jours après les grandes rafles de l’été. Si l’affluence n’atteint plus aujourd’hui les 10.000 à 12.000 participants qu’a pu connaître l’Assemblée du Désert par le passé, ce sont tout de même quelque 3000 personnes qui étaient présentes sur les terres du musée du Désert en ce 3 septembre 2023.
Le culte du matin, présidé par la pasteure Céline Rohmer(Institut protestant de théologie, Faculté de Montpellier), était retransmis en direct sur France Culture ; fidèle à la liberté de parole et à la tradition d’engagement de l’Assemblée du Désert, elle a fait, dans sa prédication, un lien entre les exils des huguenots d’il y a quatre siècles et celui des migrants actuels. « Des milliers d’hommes et de femmes aujourd’hui se tournent vers d’autres territoires que les leurs pour trouver refuge, a-t-elle ainsi souligné. Ils s’entassent, par milliers, sur des bateaux de misère fuyant, au-delà des mers, à la recherche d’une terre d’accueil. Leur exil à eux n’est pas une métaphore. C’est une urgence politique. D’autres voyageurs contraints avancent dans les couloirs sud-américains espérant trouver asile… Et ces autres, laissés agonisants dans les déserts subsahariens… Leur marche forcée, à eux, n’est pas une figure de style. C’est un cri d’injustice. »
Vue des participants de l’Assemblée du désert, édition 2023 © Défap
Les conférences de l’après-midi étaient assurées par les professeurs Frank Lestringant (Paris Sorbonne) et Gilles Vidal (Institut protestant de théologie, Faculté de Montpellier). Elles ont emmené les auditeurs à travers l’exil des protestants français fuyant les persécutions après la révocation de l’édit de Nantes, mais aussi bien plus loin. Par exemple, du côté de la Nouvelle-Calédonie, avec l’odyssée de Maurice Leenhardt. Ou encore, du côté du Brésil où des protestants réformés tentèrent, en vain, de fonder une colonie dès le XVIème siècle – une équipée née du refus initial par la France du traité de Tordesillas qui faisait tomber le Brésil sous souveraineté portugaise, et qui se traduisit par une expédition placée sous l’autorité de l’amiral de Coligny, avec des colons initialement recrutés dans les prisons du nord de la France, bientôt rejoints par deux théologiens envoyés de Genève par Calvin, Pierre Richer et Guillaume Chartier…
Vue des participants de l’Assemblée du désert, édition 2023 © Défap