Ces deux journées d’étude, qui se dérouleront à la fois au 102 boulevard Arago et Place Aurélie Nemours, sont organisées dans le cadre des travaux du GRER (Groupe de recherche sur l’Eugénisme et le Racisme) de l’Université de Paris, site Diderot. Elles visent à croiser les regards des missions protestantes francophones et anglophones sur les notions de liberté aux XIXe et XXe siècles en Afrique et en Océanie.

Détail de l’affiche du colloque

« Rendre la liberté » aux autochtones de la mission était l’essence même de l’institution missionnaire. Certains ont pu penser que la « civilisation chrétienne » avait pour mission de libérer les peuples de l’obscurantisme (fin de la magie noire, du cannibalisme, des crimes rituels, etc.), comme l’illustrent les activités de la missionnaire écossaise Mary Slessor au Calabar. Mais si la conversion au christianisme était, aux yeux des missionnaires, libératrice et libératoire pour les indigènes, que penser de la destruction et de la privation de leur culture au nom de la foi et du progrès ?

Qu’elles soient francophones ou anglophones, les missions, aux XIXe et XXe siècles, s’accordent, en grande majorité, sur le fait que, in fine, l’évangélisation des autochtones incombe aux autochtones eux-mêmes. Cependant, de la liberté d’accepter l’évangélisation à la liberté ecclésiale, voire politique, il n’y a qu’un pas. Or les missionnaires et leurs ouailles œuvrent dans le champ colonial français et britannique, ce qui interroge l’approche géopolitique de la liberté au sein du projet missionnaire dans un contexte colonial et post-colonial. Certaines Églises protestantes ont soutenu le régime colonial, y compris quand il débouchait sur des situations liberticides comme l’apartheid en Afrique du Sud, alors que d’autres s’y sont opposées. Quelles furent les limites à leur liberté auxquelles ces Églises furent confrontées ? Quelles formes de liberté ont-elles prônées ?

Priver de liberté cet Autre, qu’il soit un missionnaire indigène d’Afrique ou d’Océanie ou un missionnaire de souche européenne, ou au contraire lui accorder la liberté d’expression et d’ »être », relève du champ des altérités et des identités culturelles. La conception de la liberté est le fruit de cultures que missionnaires et autochtones véhiculent et confrontent au sein de la mission. C’est précisément au cœur de la mission que se font et se défont les libertés et les identités. Creuset des contradictions, la mission abrite et protège autant qu’elle déconstruit et détruit.

Détail de l’affiche du colloque

C’est cette question passionnante de la liberté et des missions protestantes que se propose d’explorer le colloque qui se tient les jeudi 17 et vendredi 18 mars, selon les modalités et le programme suivants :

Jeudi 17 mars 2022 : rendez-vous au Défap (102 Boulevard Arago, Paris 14e)

  • 14h00 : Ouverture du colloque : Basile Zouma secrétaire général du Défap. Claire Kaczmarek, Gilles Teulié.
  • 14h15 : Conférence inaugurale
    Gilles Vidal, Institut Protestant de Théologie, Faculté de Montpellier
      La théologie de la libération dans un contexte océanien (1990-2000). Approche comparative de deux théologiens kanak et ma’ohi contemporains.
  • 15h15 : Pause
  • 15h30-17h00. Atelier I : Défendre l’opprimé : la mission comme espace de l’humanisme ?
    Marie-Claude Mosimann-Barbier, Ecole Normale Supérieure de Paris-Saclay
      Le combat de John Philip contre l’esclavage en Afrique du Sud.
    Maud Michaud, Université du Mans
      La mission au service de l’humain : Alice Seeley Harris (1870-1970) et les campagnes humanitaires contre les atrocités du Congo de Léopold II.
    Marc Tabani, Aix-Marseille Université
      La « Loi de Tanna » : Histoire d’une théocratie presbytérienne aux Nouvelles-Hébrides (Vanuatu).
  • 17h00. Pause
  • 17h15. Visite des archives du Défap avec Claire-Lise Lombard, responsable de la bibliothèque du Défap.
  • 18h00. Apéritif dînatoire au Défap

Vendredi 18 mars 2022 : rendez-vous au GRER (Université de Paris-site Diderot, Place Aurélie Nemours, Paris 13e Bâtiment Sophie Germain, Amphi Turing)

  • 9h00 : Accueil
  • 9h30-10h30. Atelier II : Affirmer son identité : la mission comme fabrique de l’émancipation ?
    Vahi Tuheiava-Richaud, Université de Polynésie Française
      L’EPM, une église de traditions fortes à la recherche d’un nouvel équilibre : entre mutation ou rupture ?
    Chloé Pastourel, Université Clermont-Auvergne
      Entre influence et rejet des missions philanthropiques protestantes anglo-saxonnes dans la diffusion du panafricanisme durant la Conférence de l’enfance africaine en 1931.
  • 10h30-11h00. Pause
  • Clélia Lacam, Univ. Paris I Panthéon-Sorbonne / Institut des Mondes Africains
      La mission protestante en terre gabonaise : un espace de liberté féminine ? (1892-1914).
    Jean Paul Mountapmbeme, Université de Yaoundé I
      Identité africaine et Missions Protestantes : problématique de l’altérité à travers l’itinéraire d’Adolf Lotin a Same de la Native Baptist Church au Cameroun.
  • 12h00 Déjeuner
  • 14h00. ATELIER III : Composer avec l’administration coloniale : la mission comme vitrine de l’ambiguïté ?
    Dominique Ranaivoson, Université de Lorraine
      Les missionnaires protestants français dans l’insurrection de 1947 : « sur la crête du toit » entre liberté et répression.
    Francis Romuald Mvo’o, Université de Yaoundé I
      Missions protestantes au Cameroun sous la tutelle française de l’évangélisation aux activités politiques : de la subdivision du Nyong et Sanaga 1950-1960.
  • 15h00-15h30. Pause
  • Marie Julien Danga, Université de Yaoundé I
    Protestantisme et guérilla nationaliste au Cameroun sous tutelle française : cas de la subdivision Mbouda (1955-1971).
    Claire Kaczmarek, Université d’Artois
      Samuel Macfarlane (1837-1911), liberté religieuse et identités nationales dans l’Empire informel de l’espace insulaire de Lifou, Nouvelle-Calédonie.
  • 16h30. Conclusions

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