En République Démocratique du Congo, la place des femmes est fragile et peu reconnue : pénalisées par un faible accès à l’éducation, elles accèdent rarement à des emplois décents et encore plus difficilement à des postes politiques importants, sont les premières victimes de violences et de la pauvreté. Les Églises, de par leur poids dans la société, ont la capacité de faire évoluer les mentalités. Encore faut-il qu’elles accordent elles-mêmes plus de place aux femmes. C’est dans ce but que le Défap propose des bourses pour permettre à des jeunes femmes de poursuivre des études supérieures en théologie à l’Université Libre du Pays des Grands Lacs de Bukavu, de manière à former de futures cadres de l’Église du Christ au Congo (ECC), principale dénomination protestante en RDC.


Le Défap, dont les activités se déploient à travers des relations entre Églises de divers pays, entend travailler à une égale dignité des hommes et des femmes dans l’Église et dans la société. Un objectif qui figure parmi les priorités de ses actions, détaillées dans sa « feuille de route » : « Convictions et actions – 2021-2025 ». Pour cela, le Défap veut soutenir la formation théologique des femmes, encourager des projets d’éducation à l’égalité femme-homme dans l’Église, et travailler avec ses partenaires pour favoriser les candidatures féminines et encourager leur leadership dans l’Église.

Dans un pays comme la République Démocratique du Congo, les Églises sont des acteurs sociaux majeurs. Elles gèrent des écoles, des hôpitaux, ont une importante action sociale et pallient les défaillances de l’État dans de nombreux domaines. Selon le dernier rapport du cabinet d’étude « Target » sur les Églises en RDC, plus de 93% des Congolais se déclarent chrétiens, avec 42% de catholiques, 25% de protestants, 15% d’adeptes des Églises évangéliques dites de Réveil, 4% de pentecôtistes et 1% de kimbanguistes. Avec ses 1447 paroisses réparties en 47 diocèses disséminés à travers le pays, l’Église catholique joue par exemple un rôle de premier plan. Depuis la signature d’une convention en 2011, l’État lui a délégué, à travers son organisation Caritas, l’organisation de la paye des enseignants du primaire et du secondaire dans les zones rurales. Elle administre directement entre 40 et 60 % des écoles et des services de santé, privés comme publics.

Remise des diplômes en décembre 2021 aux participants à la formation continue sur « Église et leadership » à l’ULPGL © ULPGL

Les Églises protestantes gèrent également nombre d’activités cruciales pour la société congolaise – avec d’autant plus de visibilité que beaucoup d’entre elles sont regroupées au sein d’une même structure, cumulant les caractéristiques d’une Église et d’une fédération : l’ECC – l’Église du Christ au Congo. L’ECC rassemble 95 communautés ecclésiales différentes (on préférera parler de « communautés » plutôt que « d’Églises » au sein de l’ECC), dont 70 sont présentes dans la seule ville de Kinshasa. Un partenaire de taille… et surtout, une institution représentant un protestantisme moins divers qu’il n’y paraît : toutes les dénominations qui la composent se retrouvent lors d’un même synode. Et d’une communauté à l’autre, les théologies dialoguent, les liturgies se rapprochent. Les facultés de théologie jouent pour cela un grand rôle : entre les communautés baptiste, anglicane ou mennonite, on retrouvera des pasteurs qui ont fréquenté les mêmes universités et suivi les mêmes cours.

Les Églises ont la capacité de faire évoluer les mentalités

Mais dans les Églises comme dans le reste de la société congolaise, les femmes restent bien souvent cantonnées à des places subalternes. Du fait de leur poids au sein de la société, les Églises ont la capacité de faire évoluer les mentalités ; encore faut-il d’abord qu’elles évoluent elles-mêmes. L’un des principaux frein au renforcement du rôle des femmes, et à leur accession à des postes d’encadrement au sein de l’ECC, est bien souvent leur manque de formation en théologie. Ce qui est un reflet de la situation de l’ensemble du pays, où les femmes ont un accès plus difficile à l’éducation.

Un groupe de femmes congolaises dans la province du Kasaï © Myriam Samani – MONUSCO – Flickr creative commons

Le Défap propose donc des bourses pour permettre à des jeunes femmes de poursuivre des études supérieures en théologie à l’Université Libre du Pays des Grands Lacs de Bukavu, de manière à former de futures cadres de l’Église du Christ au Congo. Il s’agit d’un pôle universitaire accueillant chaque année près de 800 étudiants au sein de sept facultés : théologie, droit, sciences économiques et gestion, santé et développement communautaires, psychologie et sciences de l’éducation, sciences et technologies appliquées. Au sein de la faculté de théologie, seules une quinzaine d’étudiants sont des étudiantes. Le Défap envisage de quasiment doubler ce nombre en proposant une douzaine de bourses, permettant de payer les frais liés aux études d’une douzaine de jeunes femmes.

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