L’accueil de familles de réfugiés syriens en France, via le dispositif des « couloirs humanitaires », a repris en cette fin d’année, suite à la signature d’un nouveau protocole d’accord avec le ministère de l’Intérieur et le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères. Ce dispositif, mis en place en 2017 et dont la prolongation a été annoncée par la Fédération de l’Entraide Protestante (FEP) et la Fédération Protestante de France (FPF), s’appuie sur la mobilisation de centaines de collectifs citoyens offrant sur tout le territoire un logement gracieux aux personnes accueillies, au-delà des cercles protestants. Soledad André, envoyée du Défap au Liban comme chargée de mission de la FEP dans le cadre de ce projet des « couloirs humanitaires », évoque sa mission au micro de Benjamin Bories dans l’émission « L’invité de la FPF ».

Soledad André, envoyée du Défap au Liban comme chargée de mission de la FEP © FPF

Le 16 novembre dernier, la Fédération de l’Entraide Protestante et la Fédération Protestante de France annonçaient la signature d’un nouveau protocole d’accord avec le ministère de l’Intérieur et le ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères. Il devait permettre l’accueil en France de 300 personnes réfugiées en provenance du Liban, prolongeant l’engagement initial dit « des couloirs humanitaires » signé en 2017 avec les mêmes ministères. Depuis, les arrivées de réfugiés en provenance du Liban ont pu reprendre à Roissy. Pour permettre leur accueil, il a fallu mettre en place une structure inédite, associant notamment des ONG et des institutions liées aux Églises, mais aussi des centaines de collectifs citoyens sur le territoire français pour héberger, accompagner, aider à l’apprentissage de la langue… Ce projet associe donc de nombreux partenaires, à la fois au Liban où il faut déterminer quelles personnes ou familles peuvent entrer dans le cadre des « couloirs humanitaires » avant de les accompagner dans leur démarche d’obtention de visa, et en France même.

Soledad André intervient au Liban. Elle est envoyée du Défap comme chargée de mission pour la Fédération de l’Entraide Protestante. Après la formation au départ suivie au siège du Défap, à Paris, elle a rejoint Beyrouth. Elle y a été rejointe récemment par une autre envoyée du Défap pour renforcer le dispositif. Elle évoque ci-dessous sa mission au micro de Benjamin Bories dans l’émission « L’invité de la FPF » :

Pour comprendre comment un tel réseau s’est constitué, il faut revenir à 2016, et en Italie. Cette année-là, plus de 5000 migrants tentant d’atteindre les côtes européennes étaient morts en Méditerranée. Chaos libyen, embarcations fragiles et surchargées par les passeurs, multiplication des voyages pour tenter de contourner la surveillance des garde-côtes italiens : autant de facteurs qui avaient fait de 2016 une année particulièrement meurtrière – avec en outre une série de drames fortement médiatisés qui avaient créé un choc au sein des opinions publiques européennes. La provenance de ces naufragés venus mourir en Méditerranée, les « routes de l’exil » entre lesquelles ils avaient dû choisir, dessinaient une géographie de la fuite et du malheur jusqu’alors inconnue du grand public, dans laquelle les guerres dans des pays comme l’Irak ou la Syrie se traduisaient par des mouvements de populations allant vers la Jordanie, les camps du Liban, voire jusqu’en Afrique du Nord. Et la seule réponse des politiques européennes était la fermeture des frontières.

C’est d’abord au sein de la Communauté catholique de Sant’Egidio qu’était née l’idée des « couloirs humanitaires ». Ses juristes spécialistes du droit des étrangers avaient su utiliser les textes européens pour imaginer un dispositif destiné prioritairement aux réfugiés les plus vulnérables : enfants et familles monoparentales, patients en attente de soins urgents, personnes en butte à des persécutions. Il avait été mis en place en association avec la FCEI et avec l’Église vaudoise, membre de la Cevaa. Une opération rendue possible non seulement par l’engagement des Églises qui avaient décidé de le prendre en charge, mais aussi grâce à l’appui de bénévoles et d’associations se chargeant d’accueillir les réfugiés et de les aider à s’intégrer au sein de la société italienne.

Devant le succès de cette initiative, le modèle devait être repris dès l’année suivante en France, par le biais d’un protocole d’entente signé à l’Élysée et associant les ministères de l’Intérieur et des Affaires étrangères à cinq partenaires issus du milieu des Églises. Les réfugiés arrivant en France via ce dispositif se retrouvaient dès lors accueillis légalement dans le réseau de la FEP et de ses partenaires locaux ; des collectifs et des hébergements pour lesquels se mobilisaient nombre de bénévoles issus notamment de l’Église protestante unie de France (EPUdF) ou de l’Union des Églises protestantes d’Alsace et de Lorraine (UEPAL), deux des unions d’Églises constitutives du Défap.

Aujourd’hui, les « couloirs humanitaires » ont conquis leur légitimité. La signature du nouveau protocole d’accord en ce mois de novembre, et la reprise de l’accueil de familles de réfugiés en France, en sont la preuve.

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