Alain Gilles au travail © Défap |
Dans le local dédié à la philatélie, un étage en-dessous du hall d’accueil du Défap, les timbres s’accumulent par milliers, par kilos : en sacs destinés aux négociants qui les achètent au poids, ou regroupés par séries identiques dans des enveloppes de cent ; certains décollés, d’autres présentés sur des fragments d’enveloppes soigneusement découpés… S’activant au milieu de cet atelier, Alain Gilles, dynamique retraité et philatéliste passionné, présente les travaux en cours : «Nous recevons des timbres de toute la France. Tout fonctionne grâce au bouche-à-oreille : classiquement, quelqu’un dans une paroisse va passer le mot autour de lui, en demandant de récupérer des timbres pour le Défap ; une fois qu’il en a collecté suffisamment, il nous les envoie. Il nous faut alors les trier.»
Un véritable travail de bénédictin : l’expression fait sourire Alain Gilles, dont le père était catholique et la mère protestante. «Dans ma famille, se souvient-il, on pratiquait l’œcuménisme bien avant que ce soit à la mode.» En ce lundi 26 février, il est seul à s’activer dans le local, mais le service philatélie fonctionne grâce à l’implication de trois passionnés, tous bénévoles. Des séries de timbres disposées sur une table, face à l’entrée, témoignent d’ailleurs d’un travail de tri en voie d’achèvement. Outre Alain Gilles, il y a Geneviève Minssen et Jean Roman ; tout au long de l’année, les timbres, mais aussi les cartes postales qu’ils réceptionnent, trient, regroupent et revendent leur permettent de récolter des fonds qui vont financer des bourses pour des étudiantes à plus de 9000 km de Paris : à Kananga, en République démocratique du Congo.
Une université si loin de Kinshasa…
Pour aller plus loin :• RDC : fiche pays et actualité du Défap• Des timbres pour aider les étudiantes de l’UPRECO • Des bibles pour Kananga • Visite en images de l’UPRECO Pour aider les étudiantes de l’UPRECO, vous pouvez aussi retrouver les timbres proposés par le service philatélie sur la boutique du Défap, en cliquant ici. |
Kananga, l’ancienne Luluabourg fondée en 1884 sur la rive de la rivière Lulua, est la capitale du Kasaï-Occidental – une province enclavée, loin de la capitale Kinshasa, isolée des centres de décision par des centaines de kilomètres de routes impraticables. On n’y accède que par avion. C’est là que se trouve l’UPRECO (Université Presbytérienne du Congo), l’une des trois universités protestantes avec lesquelles les Églises de France sont en lien dans ce pays à travers le Défap. Outre la théologie, on y enseigne le droit et l’agronomie. Aussi délaissée par les autorités et privée de moyens que l’est la ville de Kananga elle-même, l’UPRECO a pourtant un rôle essentiel à jouer dans cette région extrêmement pauvre où les jeunes n’ont pas les moyens d’aller étudier dans les grandes villes plus développées. La situation est particulièrement difficile pour les étudiantes, qui vivent dans une grande pauvreté : très peu de filles ont les moyens de suivre des études, car les familles, quand elles le peuvent, choisissent de financer plutôt les études des garçons.
Les relations entre les protestants de France et cette université se sont développées suite à un séjour de professeurs français à l’UPRECO, qui sont revenus particulièrement touchés par la situation des étudiants de Kananga. Ces liens prennent aujourd’hui la forme d’un soutien direct à la faculté de théologie, d’envois d’enseignants… Ils passent aussi par des bourses d’appoint pour les étudiantes. Et voilà comment les timbres triés à Paris aident à soutenir l’Université Presbytérienne du Congo : au cours des dernières années, les revenus de la philatélie du Défap ont permis de financer en moyenne 10 bourses par an.
Toutes les bonnes volontés sont bienvenues
Etudiantes de l’UPRECO en compagnie de Jean-Luc Blanc, du Défap © Défap |
C’est un travail de longue haleine pour les trois bénévoles. «On est un peu débordé», reconnaît en souriant Alain Gilles, qui dit consacrer entre 25 et 30 heures par semaine au service philatélie du Défap : «J’emporte régulièrement du travail chez moi». Heureusement, il y a des habitués qui envoient ponctuellement, chaque année, la collecte faite dans leur paroisse : «nous avons des correspondants jusqu’en Suisse», souligne Alain Gilles. Dans le meilleur des cas, les timbres sont envoyés déjà décollés, ce qui simplifie la tâche des bénévoles ; sinon, il faudra redécouper soigneusement, un à un, chaque morceau d’enveloppe où restent attachées les précieuses vignettes… Il y a aussi, plus rarement, des legs de collectionneurs.
Mais, outre le travail sur les timbres, il faut aussi organiser la participation du Défap aux expositions et aux rencontres qui permettront d’entrer en contact avec des acheteurs. Elles sont fréquentes en région parisienne, où les cercles philatéliques sont nombreux. La dernière en date a eu lieu à Bois-Colombes, les 10 et 11 février 2018. Pour compléter l’équipe des bénévoles du Défap, le concours de nouvelles bonnes volontés serait le bienvenu – que ce soit au siège du Défap ou comme correspondant en paroisse. Pas besoin pour ça d’être philatéliste : il faut surtout avoir du temps disponible. Et accepter de se laisser surprendre.
Timbres en cours de tri au service philatélie du Défap © Défap |
«On peut découvrir des choses passionnantes», s’enthousiasme Alain Gilles, en revenant sur le thème de l’exposition de Bois-Colombes : la femme, vue à travers les timbres et les cartes postales. Lui-même, à travers son activité de bénévole, a pu renouer avec une passion d’enfance, après avoir passé toute sa vie active dans le milieu du bâtiment ; mais le monde du timbre ne demande qu’à s’ouvrir à ceux qui sont prêts à le découvrir. Précisément, la Fédération Française des Associations Philatéliques organise chaque année une opération promotionnelle d’envergure nationale appelée «Fête du Timbre», qui a notamment pour but de susciter l’intérêt des non-philatélistes. Plus d’une centaine de villes participeront à ce grand rendez-vous prévu les 10 et 11 mars 2018, dont le thème sera «l’automobile et le sport». L’occasion, peut-être, de se découvrir une nouvelle passion ; et, pourquoi pas, de soutenir les étudiantes de Kananga aux côtés du Défap…
Le Défap en République Démocratique du Congo :Le Défap travaille en lien avec les universités protestantes suivantes:– L’Université Protestante au Congo – UPC (à Kinshasa); – L’Université Libre des Pays des Grands Lacs – ULPGL (à Goma et à Bukavu); – L’Université Presbytérienne du Congo – UPRECO (à Kananga). Toutes ces universités comportent une faculté de théologie. Le Défap échange avec les facultés de théologie partenaires en RDC notamment par l’envoi de professeurs et l’accueil de boursiers. |