Emmanuel Macron s’exprimant lors du colloque « Protestantismes convictions et engagements » (capture écran de la conférence de presse diffusée sur Twitter)

Lorsqu’il s’exprime en public, Emmanuel Macron n’est jamais aussi à l’aise que dans le cadre d’un débat. Vendredi soir, il a donc en grande partie improvisé son intervention d’une quarantaine de minutes donnée à la Mairie de Paris, pour répondre aux questions que venaient tout juste de lui poser ses hôtes. Le chef de l’Etat s’exprimait au soir du premier jour du colloque « Protestantismes convictions et engagements » organisé par la Fédération protestante de France. Et qu’il s’agisse de questions liées à l’Europe, à la politique migratoire, au climat ou à la révision des lois de bioéthique, dans tous les grands enjeux politiques actuels, il a demandé aux protestants de faire entendre leur voix. Au nom même de la laïcité…

L’apport du protestantisme dans la société, a souligné le président, se mesure à travers de nombreux indicateurs comme la promotion de la conscience individuelle, l’essor de la démocratie participative, le libéralisme politique et économique ; mais il ne peut être séparé de la foi. « Comme président d’une République laïque, je serais tenté de saluer l’œuvre séculaire des protestants pour les libertés en France. Ce serait éluder quelque peu ce qui vous réunit ici : dans une réflexion commune menée dans le cadre de ces 500 ans de la Réforme et ce serait éluder votre foi. (…) Ma conviction profonde est que je ne rendrais nullement service à la laïcité si je m’adressais à vous comme à une association philosophique. Votre identité de protestants ne se construit pas dans la sécheresse d’une sociologie, mais dans un dialogue intense avec Dieu et c’est cela, ce que la république respecte. »

«  La laïcité, ce n’est pas une religion d’Etat »

Pour aller plus loin :
Quel rôle peuvent jouer les protestants dans la société ? (Réforme)
Retrouvez en vidéo l’intégralité de l’intervention du chef de l’Etat

« Vous me pardonnerez de redire ici ce que j’ai déjà dit ailleurs au sujet de cette laïcité dont trop souvent on méconnaît la nature », a insisté le chef de l’Etat ; « mais ce combat n’est jamais terminé. On ne redira jamais assez les mots d’Aristide Briand, rapporteur de la loi (de 1905, ndlr), pour définir la neutralité laïque consistant, je le cite, à « ne rien faire qui soit une atteinte à la libre constitution des Eglises ». La laïcité, ce n’est pas une religion d’Etat ; c’est une exigence politique et philosophique. » Ce n’est pas non plus « la dilution des croyances » mais « la capacité à faire dialoguer les religions dans un débat fécond ».

C’est en s’appuyant sur cette conception d’une laïcité ouverte que le président fait appel à l’éclairage des religions dans certains débats qui pourraient diviser la société. Citant volontiers son « maître », le philosophe Paul Ricœur, il a loué le rôle des « confrontations utiles » afin de trouver des « consensus féconds ». Exercice dans lequel le protestantisme français, qui a su « faire coexister sous un même toit, dans une foi partagée, des pratiques différentes, des conceptions sociales et morales parfois divergentes », a su montrer sa « vitalité démocratique et intellectuelle ». Aussi, a souligné le chef de l’Etat,  « nous avons besoin que vous restiez les vigies de la République ». Il a même formé ce vœu pour les protestants : « Pour les 500 prochaines années, en tout cas les cinq ans à venir, ne cédez rien, restez tels que vous êtes. »

Parmi ces débats qui pourraient diviser, il y a par exemple ceux qui s’annoncent dans le cadre de la révision des lois de bioéthique, en 2018. « Notre société bouge, se transforme, elle a à aborder des profonds changements » a souligné le chef de l’Etat. Mais « la manière que j’aurai d’aborder ces débats ne sera en rien de dire que le politique a une prééminence sur vous et qu’une loi pourrait trancher ou fermer un débat qui n’est pas mûr. J’ai sur certains de ces sujets pris des engagements durant la campagne présidentielle. J’ai aussi pris des engagements de méthode. » Concernant la question des migrants, un autre sujet sur lequel il avait été interpellé, peu avant son intervention, par le président de la Fédération protestante de France, le pasteur François Clavairoly, Emmanuel Macron a répondu : « Je n’oublie pas dans quelles conditions j’ai été élu par le peuple français. Je n’oublie pas le souffle chaud des extrêmes. »

Un colloque et des rendez-vous pour les 500 ans de la Réforme

Le colloque « Protestantismes convictions et engagements », organisé par la Fédération protestante de France, était un événement accueilli par la Mairie de Paris à l’occasion du 500e anniversaire de la Réforme. Ce rendez-vous international, historique et interreligieux réunissait les meilleurs spécialistes de l’histoire du protestantisme en France et dans le monde. A l’occasion du lancement de ce colloque, François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France, s’est aussi entretenu avec l’hebdomadaire Réforme sur le thème du rôle des protestants dans la société. La FPF a également présenté vendredi les autres initiatives programmées tout au long de l’année 2017 pour marquer les 500 ans de la Réforme, que l’on peut retrouver dans cet article de La Croix.

 

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