Améliorer l’autonomie des femmes passe d’abord par une meilleure formation. C’est ce qui a été fait à l’Institut supérieur presbytérien Camille Chazeaud, centre de formation de l’Église presbytérienne camerounaise (EPC), avec le soutien du Défap. Les participantes étaient les épouses des étudiants en théologie, destinés à devenir pasteurs au sein de l’EPC. Au programme : des thématiques aussi bien théologiques que pratiques.

Participantes de la formation organisée à l’ISPCC avec le soutien du Défap © ISPCC

Au Cameroun, en matière de droits des femmes, plusieurs réalités s’opposent. Officiellement, hommes et femmes sont égaux devant la loi. Le Cameroun a signé la plupart des Conventions et Traités internationaux et régionaux sur la protection et la promotion des droits de la femme. Il existe même un ministère de la Promotion de la Femme et de la Famille du Cameroun. Mais ces réalités juridiques peinent à s’affirmer dans le quotidien, face à des normes culturelles qui, concrètement, interdisent tout traitement égal. Une situation qui influe directement sur la vie des Églises : le ministère pastoral féminin est peu reconnu. Les femmes peuvent devenir pasteures au sein de l’Église évangélique du Cameroun depuis le début des années 2000, mais aujourd’hui encore, elles ne constituent guère plus de 10% du corps pastoral et doivent surmonter de nombreux obstacles. Quant à l’Église presbytérienne camerounaise (EPC), elle n’accepte toujours pas de femmes pasteures et a du mal à se saisir de la question. Les femmes y sont pourtant nombreuses et actives ; elles sont les plus impliquées dans la vie des paroisses et dans les activités diaconales ; et des mouvements contribuent depuis longtemps à accroître leur visibilité, comme l’association chrétienne des femmes (ACF), la plus ancienne et la plus puissante des associations chrétiennes de l’EPC.

Pour renforcer le rôle des femmes, il est donc nécessaire d’agir sur les mentalités. Les Églises, de par leur poids au sein de la société camerounaise, peuvent y contribuer, à condition qu’elles-mêmes accordent davantage de place aux femmes. Et pour cela, la formation est essentielle. C’était l’objectif de la formation de la section féminine à l’ISPCC (l’Institut supérieur presbytérien Camille Chazeaud) organisée en 2022 avec le soutien du Défap.
 

Participantes de la formation organisée à l’ISPCC avec le soutien du Défap © ISPCC

L’ISPCC, centre de formation de l’EPC, se trouve à Foulassi, au sud du Cameroun. C’est dans cette localité qu’avait été fondée en 1925 une première station missionnaire sous l’impulsion du pasteur suisse Camille Chazeaud, surtout connu aujourd’hui pour avoir composé, le 29 octobre 1957, le chant de ralliement qui devait devenir l’hymne national du Cameroun. L’ISPCC, institution universitaire privée et confessionnelle, dispose de deux facultés : faculté de théologie et des sciences religieuses et faculté des sciences sociales. La faculté de théologie et des sciences religieuses (FTSR) prépare de manière spécifique à l’exercice du ministère pastoral pour les Églises protestantes du Cameroun et d’Afrique centrale. Comme les étudiants inscrits en théologie vivent sur le campus avec leurs épouses et leurs enfants, la section féminine aide pour sa part la FTSR à donner une formation théologique et pratique aux épouses des étudiants.

Souvent mariées très jeunes, ces épouses de futurs pasteurs n’ont que rarement eu l’occasion d’acquérir des compétences professionnelles. Or, comme le souligne le pasteur Jean Patrick Nkolo Fanga, recteur de l’ISPCC, et qui enseigne par ailleurs la théologie pratique à la Fateb (la faculté de théologie évangélique de Bangui), elles devront faire face à de nombreuses attentes dans les paroisses une fois leur mari formé et en poste. Avec cette formation de la section féminine à l’ISPCC, il s’agissait de leur donner des compétences pour qu’elles puissent prendre toute leur place au sein de l’Église, et jouer un rôle moteur dans les associations de femmes.

D’où le double aspect de cette formation : théologique et pratique. Les épouses de pasteurs peuvent aussi bien être amenées à faire des prédications qu’à monter des projets. Leur rôle peut aller de l’animation d’études bibliques pour les femmes, enfants et jeunes filles, à la relation d’aide, mais aussi à la mise en place d’activités génératrices de revenus… Un fort accent a d’ailleurs été mis sur ce dernier point lors de cette formation, car les besoins sont importants dans les paroisses. Permettre aux femmes de sortir de la pauvreté est la première étape vers l’autonomie. Les participantes de la section féminine de l’ISPCC ont ainsi pu être formées au management de projet, à la mise en place d’activités génératrices de revenus – avec des exemples très concrets lors d’ateliers de création de jus, de chapeaux, de teintures ou de confitures. Des compétences que certaines des épouses d’étudiants ont aussitôt mises à profit en créant leur propre activité…

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