Pour de nombreux migrants subsahariens cherchant à gagner l’Europe, le Maroc est une étape qui, bien souvent, s’éternise, du fait du durcissement des politiques d’accueil européennes. Depuis des années, l’Église évangélique au Maroc les accompagne, à travers notamment l’action du Comité d’Entraide Internationale. L’aide financière de divers partenaires internationaux, dont le Défap, a permis de distribuer à ces migrants une aide multiforme au cours des dernières années. Le but étant désormais d’étendre ce soutien à la Tunisie, qui connaît des problématiques similaires.

Un exemple de la précarité des migrants : à la mi-décembre 2018, un camp prend feu près de la gare routière de Casablanca-Ouled Ziane © CEI

L’Église évangélique au Maroc accueille des migrants originaires pour la plupart d’Afrique subsaharienne. Qu’ils soient étudiants ou en transit au Maroc dans l’espoir de gagner l’Europe, ils ont un point commun : leur précarité, qui s’est accentuée avec la pandémie de Covid-19.

Si l’on regarde du côté des migrants, l’histoire de ces hommes, femmes et enfants qui peuplent les villages précaires et les camps comme celui de Fès, où travaille notamment le Comité d’Entraide Internationale (CEI), bras diaconal de l’Église évangélique au Maroc (EEAM), est à chaque fois unique, mais toujours mouvementée. Répartis en quartiers selon les pays d’origine, c’est une petite Afrique qui s’y est reconstituée, faisant cohabiter les nationalités : Nigériens, Ivoiriens, Camerounais, Gambiens, Érythréens… Si l’on regarde du côté des étudiants, ils seraient aujourd’hui près de 8000 jeunes Subsahariens à poursuivre des études au Maroc. Une partie sont soutenus par l’Agence Marocaine de Coopération Internationale (AMCI). Mais le reste dépend essentiellement de l’aide des tuteurs et/ou de la famille, condamnant souvent ces étudiants à la plus grande précarité.

Le Maroc, de pays de transit à pays d’accueil

Traditionnellement pays de transit pour les migrants subsahariens qui désirent se rendre en Europe, le Maroc s’est mué depuis quelques années en pays d’accueil. En cause, notamment : le durcissement des politiques européennes. Nombre d’entre eux se retrouvent donc à rester plus longtemps que prévu au Maroc. Quitte à s’y installer définitivement. Selon une enquête réalisée par une instance marocaine, le Haut-Commissariat au Plan (HCP), au cours du premier trimestre 2021, 53,7% des migrants déclarent vouloir finalement rester dans le royaume.

Le Maroc a ainsi lancé de vastes campagnes de régularisation des sans-papiers, décidées dans le cadre de la Stratégie nationale d’immigration et d’asile adoptée en 2013. La dernière de ces campagnes en date remonte à fin 2021. Mais franchir l’étape de la régularisation ne marque pas pour autant la fin des tracas administratifs. Et pour les migrants, accéder à l’emploi reste un horizon souvent inaccessible. D’après l’enquête du Haut-Commissariat au Plan, 48% seulement exerçaient une activité professionnelle en 2021, plus de 27% étant au chômage. Mais entretemps est venu le Covid-19, et neuf migrants sur dix qui avaient un emploi avant la pandémie l’ont perdu.

Pour leur venir en aide, le CEI et l’EEAM ont le soutien de nombreux partenaires internationaux : le Défap, mais aussi des communautés baptistes américaines, l’Église évangélique en Rhénanie (EKiR) ou encore l’Église vaudoise d’Italie à travers le « Huit-pour-mille » (« Otto-permille »)- un dispositif fiscal typiquement italien qui permet aux contribuables de financer directement les Églises notamment en vue d’actions de solidarité. Grâce à cette mobilisation, les migrants ont pu bénéficier d’une aide multiforme, entre mai 2019 et décembre 2021 : aide d’urgence (alimentaire, médicale, vestimentaire, au logement), accompagnement des femmes et enfants, régularisation, bourses d’études. L’objectif aujourd’hui est de poursuivre cette action au Maroc et de capitaliser ce qui a été fait pour l’appliquer en Tunisie. En effet, l’Église réformée de Tunis est peu outillée pour répondre aux problématiques migratoires auxquelles elle est confrontée.

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