Comment vous êtes-vous engagé auprès du CEI ?
Je travaille avec le CEI ( Comité d’Entraide International) qui est le service diaconal de notre église. Je ne suis pas pasteur mais de formation scientifique. J’ai fait de la biologie médicale. En 2011 j’ai travaillé comme coordinateur de projets bénévole au niveau du comité, j’étais alors responsable du bureau local de l’EEAM à Rabat. En mars 2013, j’ai été recruté comme coordinateur de projet national. Je suis toujours à la paroisse de Rabat même si, dans le cadre de mon travail, je suis amené à me déplacer en dehors de ce périmètre.
(de gauche à droite) William Ledy (un des anciens agents du CEI), le pasteur Carlos FUNK (envoyé du DEFAP au CEI entre 2012 et 2015) et Jean-Louis Ntumba
En quoi consiste votre mission ?
Je m’occupe de la mise en œuvre de certains projets comme d’un programme de bourses envers les étudiants et un projet de formation professionnel auprès de migrants, qui sont en situation administrative irrégulière. Ce dernier projet existe depuis 2011. L’idée au départ était que les migrants, en situation irrégulière, en forment d’autres en situation irrégulière. Le projet a depuis évolué. Aujourd’hui, il y a aussi des ateliers en interne, dans la paroisse, faits par des migrants mais aussi des marocains.
Je connais très bien les difficultés que rencontrent les migrants. Moi aussi j’ai été boursier. En 2004, je suis venu ici dans le cadre de mes études. Lorsque je suis arrivé, on m’a aussi vendu du rêve. On m’a dit que j’allais étudier dans des meilleures conditions alors que ce n’était pas le cas. Je me sens très proche des migrants. J’aurais pu être à leur place. On ne peut pas rester ici à ne rien faire. En Afrique, rien n’est stable. On n’est jamais à l’abri d’un conflit, d’une crise humanitaire….ça peut arriver à tout le monde, il faut aider ceux qui sont en difficulté.
Comment le CEI assiste-t-il les migrants ?
Le Maroc accueille beaucoup d’étudiants de tous les pays d’Afrique. Il arrive souvent que ces étudiants rencontrent des difficultés financières. Notre église a développé des bourses pour aider ces étudiants subsahariens. Chaque année, à partir de septembre, nous lançons un appel à candidatures dans nos paroisses. Cette année cela concerne une centaine d’étudiants.
Nous proposons également une aide au retour. C’est-à-dire que nous pouvons contribuer au rapatriement de l’étudiant à la fin de ses études. Nous réglons les billets d’avion et les arriérés des étudiants avec leurs écoles lorsque cela est nécessaire.
Toutes nos équipes travaillent dans nos paroisses, qu’il s’agisse des bénévoles ou des « agents » (qui bénéficient d’un modeste soutien financier). Les agents et les bénévoles font le lien entre les bénéficiaires (c’est-à-dire les migrants) et notre organisme.
Chaque semaine, nous ouvrons les portes de notre paroisse pour les personnes en difficulté. Notre personnel les écoute, les reçoit et les oriente vers des structures partenaires. Au quotidien, nos équipes locales sont présentes dans huit villes marocaines (Rabat, Casablanca, Tanger…). Cela représente une quarantaine de personnes.
Nous avons accueilli de nombreux migrants jusqu’à aujourd’hui. Pour la seule paroisse de Rabat, 602 personnes se sont rendues dans nos permanences ces six derniers mois.
Les migrants que nous rencontrons viennent en majorité du Nigéria. Mais nous rencontrons des difficultés de communication. Car nos équipes sont toutes francophones et ces personnes sont anglophones. Ensuite, les migrants peuvent venir du Cameroun, de la République Démocratique du Congo. Nous accueillons aussi des jeunes mineurs venus de Guinée, de Côte d’Ivoire et des Congolais ou encore des Centrafricains. Toute l’Afrique de l’Ouest et une partie de l’Afrique Centrale sont représentées ici.
(au centre ) Jean-Louis Ntumba avec les étudiants boursiers du CEI
de l’année universitaire 2014-2015, dec 2014, DR
Quels sont les besoins du CEI ?
Actuellement, le bureau national du CEI réfléchit à ses ressources humaines. Il a beaucoup évolué en quelques années. En 2011 il n’y avait que quatre équipes locales, aujourd’hui elles ont doublé. Les activités ne sont plus basées que sur des bénévoles. Nous avons besoin d’avoir des ressources humaines stables. Nous envisageons un noyau commun dans chaque équipe. Nous aimerions éviter d’avoir des départs impromptus de bénévoles. La migration ne finira pas, il y aura toujours des besoins. Mais c’est une population vulnérable qui a de nombreux besoins (logements, alimentation, formation…).
Qu’attendez-vous des Eglises françaises ?
Nos attentes sont simples. Nous souhaitons d’abord que cette collaboration puisse continuer. Car les Eglises nous aident énormément. Actuellement, nous finalisons le projet « accueil de l’enfant », qui est centré sur les mères migrantes, afin que leurs enfants puissent être scolarisés. Ce programme a reçu un vrai soutien des Eglises françaises et nous les en remercions.
Nous avons également monté un projet de rapatriement des migrants en situation de vulnérabilité. Nous souhaiterions que les Eglises françaises puissent sensibiliser les migrants sur les réalités économiques des pays d’accueil, avant leur départ.
(au centre) Jean-Louis Ntumba avec des stagiaires de la formation professionnelle du CEI,
le jour de la remise de leurs attestations, juin 2014, DR