Romain à Madagascar : construire un village pour les enfants des rues

« 2400 sourires », le projet de village d’enfants destiné à accueillir les plus fragiles et menacés, ceux qui sont à la rue, avance bien, porté par Romain. Dans cette lettre de nouvelles, il évoque le chantier, les constructions qui sortent de terre, mais aussi les rencontres avec les enfants des rues auprès desquelles il se rend, en compagnie de bénévoles venus prêter main-forte au projet.

Groupe d’enfants malgaches © Romain pour Défap

 

Téléchargez cette lettre de nouvelles en pdf

 

Madagascar.
Après la formation Défap et un temps de congés en France, nous y retrouvons un quotidien bien rempli dans notre travail auprès des enfants des rues.

La construction d’un Village pour les enfants des rues : le chantier, débuté il y a un peu plus d’un an, bat son plein. Après avoir achevé la construction du mur d’enceinte du terrain (qui aura demandé 3 mois de travail à 100 ouvriers par jour), nous poursuivons la construction de la cantine, un local technique, le hall des sports/bâtiment administratif du Village et un grand travail de terrassement. Tous ces travaux de construction demandent beaucoup d’énergie, de temps et surtout de patience car il faut parfois revoir les délais d’avancement en fonction des possibilités de livraison des matériaux, des premières pluies arrivées plus tôt que prévues et qui rendent les routes difficilement praticables. Mais le chantier avance toujours !

Les bâtiments sortent de terre © Romain pour Défap

La venue de bénévoles : dès le mois de septembre, nous avons eu la joie d’accueillir plusieurs bénévoles venus de France pour prêter main forte au développement du projet. Ainsi, 14 personnes nous auront rejoints entre septembre et décembre :  9 personnes  venues servir auprès des enfants d’un centre de rééducation géré par l’administration pénitentiaire auprès duquel nous intervenons une fois par mois mais également pour participer à la mise en peinture de locaux ; un couple venu développer le scoutisme dans le village où nous résidons actuellement et construire un four à pain/pizza au « Village 2400 sourires » ; deux basketteuses professionnelles venues pour la création d’un terrain de basket-ball sur le site ; et enfin un autre bénévole qui nous a beaucoup prêté main-forte dans la mise en peinture des locaux existants.

Autant de personnes qui ont eu à cœur de soutenir en venant sur le terrain, laissant une belle empreinte de leur passage au Village en construction !

Romain (tout à droite de la photo) avec un groupe d’enfants malgaches et des soutiens du projet © Romain pour Défap

Les interventions auprès des enfants des rues : chaque mercredi, notre équipe part à la rencontre des enfants des rues qui attendent notre venue avec impatience ! Quelques heures auprès d’eux nous permettent de partager des moments forts de jeux, de sport, de chants, de danses (malgré la pluie qui s’invite parfois) et de leur offrir un repas (distribution de Koba, une farine alimentaire enrichie en vitamines et nutriments mais également parfois des beignets, sandwichs, etc. selon les dons que l’on reçoit de particuliers). Nos bénévoles participent avec nous à ce moment important dans notre agenda. Il s’agit toujours de moments intenses où l’on vient partager de l’amour et de la joie avec ces enfants et où on reçoit énormément aussi !

Une visite officielle de l’Etat : nous avons également eu la chance de recevoir la visite de Madame la Ministre de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle qui a tenu à venir découvrir sur place le développement du « Village 2400 sourires ». Nous avons pu lui présenter le projet et échanger sur notre souhait de créer quelque chose de durable pour ces enfants. Ce fut une visite encourageante pour toute l’équipe !

En résumé, des défis, parfois des doutes mais beaucoup d’encouragements qui permettent d’avancer et de ne pas oublier qu’aimer sauve toujours !
Pour en savoir plus, rdv sur notre site 2400sourires.org.

L’entrée du village © Romain pour Défap




Sarah à Madagascar : « C’est fantastique de pouvoir créer des liens »

Des nouvelles de Sarah, envoyée du Défap actuellement en mission d’animatrice et d’appui à l’enseignement du français au centre Akanisoa, qui regroupe une école et un orphelinat. Ses premières impressions après quatre mois passés sur place : une grande proximité avec les enfants.

Sarah au Défap, en juillet 2023, pendant la formation des envoyés © Défap

 

Téléchargez cette lettre de nouvelles en pdf

Manao ahoana !

Déjà 4 mois que j’ai commencé ma mission. Je me sens bien à Antsirabe, je suis de plus en plus à l’aise pour me déplacer ou faire mes achats toute seule. J’arrive à m’habituer à ce nouveau rythme de vie où les journées commencent et se terminent plus tôt qu’en France.

Le début de semaine je suis hébergée au centre Akanisoa où je travaille et depuis le mois de décembre j’ai emménagé en colocation avec des Malgaches. Je passe donc la fin de semaine dans notre logement.

Tous les matins je travaille à l’école du centre, où j’aide les enseignantes pour l’apprentissage du français. Ensuite à la pause du midi je passe du temps avec les enfants de l’orphelinat. Puis les soirs où je suis à l’orphelinat je les aide avec leurs devoirs ou bien je passe juste du temps avec eux.

Sarah avec les enfants qu’elle accompagne au centre Akanisoa © Sarah pour Défap

J’ai toujours un peu de mal à prendre des initiatives que ce soit à l’école ou à l’orphelinat mais je m’y sens bien. Je suis à l’aise avec les enfants de l’orphelinat, certains osent de plus en plus à me parler en français. C’est vraiment fantastique de pouvoir créer des liens sans trop parler, seulement avec les sourires, les chatouilles, les jeux, les danses… Quelques enfants m’ont d’ailleurs appris à compter en malgache en jouant au Uno, et cherchent souvent à m’apprendre de nouveaux mots (ou me faire réviser ceux que je connais déjà).

Pendant les vacances de Noël, j’ai eu l’opportunité de partir sur la côte avec l’orphelinat. Le projet n’aurait pas pu se réaliser avec les finances du centre. J’ai alors mis en place une cagnotte et grâce à la générosité de beaucoup nous avons pu rendre le projet possible !

Les trajets étaient très longs et fatigants mais ça valait le coup. Nous sommes allés à la plage tous les jours, j’ai essayé d’apprendre à nager à certains, j’ai pu aussi prêter mes lunettes de piscine aux enfants pour qu’ils essayent de voir des poissons et des crabes. Nous avons passé de très bons moments, mangé de bons repas (et goûters) et vu de magnifiques paysages !

Paysage de Madagascar au cours d’une excursion © Sarah pour Défap




Service civique : soutenez la pratique du français à Madagascar

Madagascar

Mission de service civique de 9 à 11 mois

Élèves d’une école de Madagascar © Défap

 

Postulez !

Contexte

Le centre Akanisoa, situé à Antsirabe, sur les hauts plateaux, regroupe un orphelinat et une école. Il accueille chaque rentrée scolaire depuis une dizaine d’année un volontaire en mission qui vient soutenir les activités des enseignants et intervenants et contribue ainsi à ce que l’éducation soit accessible à tous.

Mission : promouvoir les échanges interculturels et linguistiques

  • Aider aux devoirs, participer à des activités d’accompagnement à la lecture et à la conversation en français par une approche participative (pratique orale de la langue)
  • Participer à des animations socio-éducatives et des activités ludiques (jeux collectifs, chants, théâtre, musique..) en fonction de ses compétences
  • Accompagner des activités extrascolaires (de plein air, sportives, culturelles…)

 

 

« Voir les attaches que j’ai avec les enfants d’Akanisoa, mes collègues de travail ou avec mes amis malgaches, sentir ces liens et ces nœuds, que l’on a tissés peu à peu, jusqu’à en faire des tresses ténues et solides, basées sur la confiance et le respect… »
Samy

« J’en ai retiré beaucoup de choses pour mes études : en matière de pédagogie, dans mon travail sur la langue, l’interculturel ; et aussi sur la communication non-violente. »
Mahieu




Service civique : soutenez l’éducation pour tous à Madagascar

Madagascar

Mission de service civique de 9 à 11 mois

Élèves d’une école de Madagascar © Défap

 

Postulez !

Contexte

L’orphelinat Maso Hafa accueille une vingtaine d’enfants dans la banlieue d’Antananarivo. Le directeur, une assistante sociale et une cuisinière résident sur place et une équipe de bénévoles locaux collabore aux différentes activités. La structure offre un lieu de rencontre pour les orphelins et les enfants du quartier. Les activités se font en français afin de permettre aux enfants de se familiariser avec la langue qui est celle de l’enseignement secondaire et supérieur.

Mission : promouvoir les échanges interculturels et linguistiques

  • Aider aux devoirs, participer à des activités d’accompagnement à la lecture et à la conversation en français
  • Participer à des animations socio-éducatives et des activités ludiques (jeux collectifs, chants, théâtre, musique..) en fonction de ses compétences
  • Accompagner des activités extrascolaires (de plein air, sportives, culturelles…)
  • Participer à l’accueil et l’encadrement des enfants au sein de la structure.

 

 

 




VSI : accompagnez la scolarité des enfants d’un orphelinat de Madagascar

Madagascar

Mission VSI de 12 mois, renouvelable

Élèves d’une école de Mahanoro, Madagascar © Défap

 

Postulez !

Contexte

L’Église réformée de Madagascar (FJKM), partenaire du Défap, coordonne de nombreuses œuvres scolaires réparties à travers le pays. La mission se déroule à l’orphelinat de Topaza pour un accompagnement des enfants accueillis (49 enfants de 0 à 18 ans).

L’enjeu se situe dans les échanges interculturels et linguistiques autant que dans la pratique du français : il s’agit de donner aux enseignants l’occasion d’échanger avec une personne de langue maternelle française et d’améliorer ainsi leur maîtrise du français, mais aussi de s’ouvrir mutuellement à d’autres méthodes d’apprentissage et à une culture différente.

Mission : soutien à l’orphelinat de Topaza

  • Renforcer la maîtrise du français pour les enfants
  • Animer des sessions d’échanges culturels, de jeu, d’aide aux devoirs, de sorties sportives
  • Utiliser et faire découvrir des méthodes et outils pédagogiques différents
  • Faire découvrir la culture française



VSI : contribuez à l’enseignement du français à Madagascar

Madagascar

Mission VSI de 12 mois, renouvelable

Élèves d’une école de Mahanoro, Madagascar © Défap

 

Postulez !

Contexte

À Madagascar, les Églises partenaires du Défap, qu’elles soient réformées ou luthériennes, coordonnent de nombreuses œuvres scolaires réparties à travers le pays : les volontaires travaillent aux côtés des enseignants de collèges-lycées ou des responsables des structures.

L’enjeu se situe dans les échanges interculturels et linguistiques autant que dans la pratique du français : il s’agit de donner aux élèves et enseignants l’occasion d’échanger avec une personne de langue maternelle française et d’améliorer ainsi leur maîtrise du français, mais aussi de s’ouvrir mutuellement à d’autres méthodes d’apprentissage et à une culture différente.

Pour les structures d’accueil, l’enjeu est également de montrer par la présence quotidienne d’un volontaire qu’une solidarité concrète se vit entre la France et les pays de mission.

Mission : soutien à l’enseignement du français dans un établissement scolaire

  • Améliorer la connaissance de la langue par les élèves
  • Renforcer la maîtrise du français par les enseignants et le personnel encadrant
  • Seconder le personnel dans l’enseignement : cours de français (et autres matières selon compétences), conversation orale, didactique, pédagogie de l’enseignement…
  • Utiliser et faire découvrir des méthodes et outils pédagogiques différents (jeux, chants, théâtre…)
  • Faire découvrir la culture française

 

 

« Voir les attaches que j’ai avec les enfants d’Akanisoa, mes collègues de travail ou avec mes amis malagasys, sentir ces liens et ces nœuds, que l’on a tissés peu à peu, jusqu’à en faire des tresses ténues et solides, basées sur la confiance et le respect… »
Samy

« J’en ai retiré beaucoup de choses pour mes études : en matière de pédagogie, dans mon travail sur la langue, l’interculturel ; et aussi sur la communication non-violente. »
Mahieu




Service civique : soutenez la pratique du français à travers des animations socio-éducatives à Madagascar

Madagascar

Mission de service civique de 9 à 11 mois

Élèves d’une école de Madagascar © Défap

 

Postulez !

Contexte

Le Défap collabore avec la communauté Mamré sur des projets de développement (constructions d’une maison d’accueil, d’un centre de conférence, d’une ferme pour vaches laitières). Celle-ci est présente dans le quartier d’Andohalo depuis plus de cinquante ans et active auprès de la population et tout particulièrement des enfants venant de familles nombreuses et démunies. La cantine scolaire de la communauté accueille chaque jour 80 à 100 enfants pour le repas de midi et des activités extrascolaires dans l’après-midi (repas, fêtes de fin d’année, accompagnement aux devoirs, activités ludiques, ateliers musique ou théâtre). Les activités se font en français afin de permettre aux enfants de se familiariser avec la langue qui est celle de l’enseignement secondaire et supérieur.

Mission : promouvoir les échanges interculturels et linguistiques

  • Aider aux devoirs, participer à des activités d’accompagnement à la lecture et à la conversation en français
  • Participer à des animations socio-éducatives et des activités ludiques (jeux collectifs, chants, théâtre, musique..) en fonction de ses compétences
  • Accompagner des activités extrascolaires (de plein air, sportives, culturelles…)
  • Participer à l’accueil et l’encadrement des enfants au sein de la communauté.

Le cahier des charges et l’emploi du temps sont établis avec le tuteur local, en fonction des compétences et centres d’intérêt du volontaire, et peuvent être évolutifs tout au long de la mission.

 

 

 




Armonie : «Qui es-tu, toi qui viens dans notre pays ?»

Armonie est partie pour une mission d’enseignement à Madagascar. Une mission qui a vu sa vie prendre une nouvelle direction, puisqu’elle a rencontré son mari sur place… Elle évoque les moments partagés avec les enfants en-dehors des cours et leur insatiable curiosité ; et ce qu’elle a découvert de la société malgache à travers eux : une société qui les oblige à grandir trop vite…

Armonie : « Qui es-tu, toi qui viens dans notre pays ? »


Télécharger son témoignage
 

► Retour au sommaire de la rubrique « Témoignages »

 




Timothée : «Ça m’a ouvert les yeux sur certains aspects de ma culture»

Timothée a passé cinq ans en famille à Madagascar, où il était enseignant à l’Institut supérieur de théologie évangélique (ISTE) de Tananarive. Rapport au confort matériel, à la vie en communauté, au temps qui passe : ce séjour au long cours a beaucoup modifié ses conceptions, et a éclairé d’une lumière crue certains aspects de sa culture.

Timothée : « Ça m’a ouvert les yeux sur certains aspects de ma culture »


Télécharger son témoignage
 

► Retour au sommaire de la rubrique « Témoignages »

 




Madagascar : sur la piste de la « Trive 1 »

Ce samedi 2 décembre la paroisse des Batignolles (Paris 17e) redécouvrait un pan de son histoire qui la relie depuis un siècle à la Grande île.
Claire-Lise Lombard et Faranirina Rajaonah lors de la conférence donnée le 2 décembre à la paroisse des Batignolles © EPUdF

 
En 1923, en pleine période coloniale, Jean Beigbeder partait, pour le compte des UCJG (Union chrétienne de jeunes gens), fonder à Antananarivo (Madagascar) un foyer pour les jeunes malgaches. Dans le même élan, il lançait la première troupe d’éclaireurs unionistes, la T[anana] rive 1. Jean Beigbeder, éducateur et commissaire national éclaireurs, appartenait à une famille enracinée dans la paroisse depuis trois générations.  

Film ci-dessous : Les éclaireurs unionistes à Madagascar / Marc-André Ledoux (1952) – Bibliothèque du Défap

 



Les initiateurs de l’événement, un groupe d’anciens de la Trive 1, avaient choisi cette date et ce lieu en prélude aux manifestations prévues à Madagascar en 2024. Culte, messages (officiels ou personnels), souvenirs et témoignages (beaucoup d’émotions pour les plus anciens !), conférence historique sur les Lettres de Tananarive (écrites par Jean Beigbeder entre 1923 et 1927 et conservées dans les archives du Défap), repas festif se sont succédé ce 2 décembre dans une ambiance de salade russe réussie.

Pari tenu pour les organisateurs : jeunes et vieux (de 12… à plus de 100 ans pour la doyenne !), scouts ou non, Malgaches ou Vazaha, venus « des quatre coins de l’horizon » hexagonal, se sont réjouis ensemble… d’une naissance qui continue à porter des fruits, en France – où la branche des Tily, les scouts unionistes malgaches, vit sa vie au sein des EEUdF – et à Madagascar – où les Tily eto Madagasikara tracent leur route.

Claire-Lise LOMBARD,
bibliothécaire du Défap

  

Revivez ci-dessous en vidéo l’intégralité des célébrations consacrées au centenaire de la « Trive 1 » à la paroisse des Batignolles, le 2 décembre 2023 (début de la conférence « Paris-Antananarivo, 1924 : sur la piste de la Trive 1 » vers 3:16:36)

 





Madagascar : la paroisse des Batignolles fête les 100 ans de la « Trive 1 »

Le 2 décembre 2023, la paroisse des Batignolles accueille la fête en avant-première du centenaire du premier groupe scout protestant de Madagascar. Une forme de retour aux sources : cette paroisse était celle de Jean Beigbeder avant son départ pour Tananarive, où il devait fonder en 1924 le mouvement des Éclaireurs unionistes malgaches. Mais cette célébration sera aussi l’occasion de rencontres autour de Madagascar… et de retrouvailles pour nombre de familles, françaises comme malgaches, aujourd’hui installées en France, dont l’histoire a été directement marquée par l’aventure de la « Trive 1 ».
L’affiche de la célébration à Paris du centenaire du premier groupe scout protestant de Madagascar

 

Inscrivez-vous !

 
Avant de devenir le fondateur du scoutisme unioniste à Madagascar en 1924, Jean Beigbeder avait déjà été l’une des premières figures du mouvement en France. C’est lui notamment qui, à Paris, avait créé dès 1912 la troupe de Clichy – troupe qui devait devenir Batignolles III en 1915. Et c’est à la paroisse de l’Église protestante unie des Batignolles que seront célébrés, le 2 décembre 2023, les cent ans du premier groupe scout protestant de Madagascar, la « Trive 1 ». Pendant que se préparent parallèlement sur la Grande Île les festivités du centenaire des Éclaireurs unionistes…

La « Trive 1 » : un groupe interculturel © Chrystel Raharijaona pour Défap

À Madagascar, de tels rendez-vous sont honorés avec faste. En 1964, la Poste malgache avait diffusé un timbre spécial à l’occasion du quarantième anniversaire. En 2004, lors de la cérémonie d’ouverture des 80 ans des scouts protestants organisée au Palais des sports et de la Culture, à Tananarive, le président de la République, qui était alors Marc Ravalomanana, leur avait promis deux cent millions de francs malgaches. Une enveloppe destinée à financer des projets de développement, répartie entre les principales composantes des scouts protestants, les « Tily eto Madagasikara » (les Éclaireurs) et les « Mpanazava eto Madagasikara » (les Éclaireuses), mais qui n’oubliait pas les scouts catholiques, les « Antilin’ny Madagasikara ». Il faut dire que les valeurs, ainsi que le rôle éducatif et social des scouts, bénéficient d’une excellente reconnaissance dans l’île. Le mouvement a contribué à préparer l’indépendance du pays. Lorsque Madagascar a connu de graves inondations en mars 1959, leur rôle dans l’assistance aux sinistrés leur a valu de recevoir une distinction honorifique de la part du président de la République, Philibert Tsiranana, pour leur « dévouement exceptionnel » et leur « abnégation totale devant le danger », leur action ayant « sauvé de nombreuses vies humaines ». Aujourd’hui encore, les « Tily » (les « sentinelles ») assument un rôle en faveur de « la promotion de l’engagement citoyen » et de « l’intégrité dans le processus démocratique » auprès de Transparency International Initiative Madagascar (TI-MG) ; ils ont signé une convention avec le Centre de Recherches et d’Appui pour les alternatives de Développement Océan Indien (CRAAD-OI) pour mieux comprendre et agir face au dérèglement climatique ; ils développent des projets en lien avec les ODD (les objectifs de développement durable des Nations unies)…

Membres de la « Trive 1 » © Chrystel Raharijaona pour Défap

La double culture de la « Trive 1 »

Si, historiquement, le mouvement scout catholique a été le premier créé dans l’île, devançant de quelques mois les scouts protestants, ces derniers ont connu un développement plus important. Lorsqu’il signa officiellement leur acte de naissance en 1924, Jean Beigbeder dirigeait à Tananarive le « Foyer », une section des Unions chrétiennes de jeunes gens (UCJG). Un lieu dont il devait bientôt chercher à faire un « espace franco-malgache », avec la possibilité pour des « jeunes » de différents âges, bridés dans leurs aspirations, d’accéder à la culture européenne, tout en participant à la valorisation de la leur propre. Cette recherche de la rencontre, palpable dans ses lettres de l’époque, donna aussi une coloration particulière à la « Trive 1 », le premier groupe scout protestant. Un groupe d’emblée marqué par « une double culture, avec des familles françaises et malgaches », souligne Chrystel Raharijaona, dont le père et avant lui, toute la famille paternelle a fait partie de la « Trive 1 » dès les années 30. Elle-même, engagée au sein des Éclaireuses et Éclaireurs Unionistes de France (EEUdF), évoque « les liens affectifs forts, et les amitiés qui se sont créées » à travers ce groupe, par-delà les frontières culturelles. Un aspect qui a persisté après la « malgachisation » du mouvement scout dans l’île : la « Trive 1 » restait un groupe particulier, multiculturel, où l’on parlait français, tout en cultivant l’engagement fort du groupe et de ses membres au sein du mouvement des Tily Eto Madagasikara et plus largement, en prenant part au développement de Madagascar.
 

Film ci-dessous : « Tily Malagasy (Sentinelles Malgaches) » par les Éclaireuses et Éclaireurs unionistes de France (1951) – Archives départementales du Val-de-Marne. Commentaire rédigé par Faranirina Rajaonah, lu par Helimamy Esoavelomandroso et Claire-Lise Lombard.



Lors de sa création, la « Trive 1 » était le reflet du milieu dans lequel évoluait Jean Beigbeder à Tananarive : on y trouvait notamment « des enfants de familles bourgeoises, intellectuelles ou influentes », témoigne Chrystel Raharijaona. Et c’est « cette génération qui a dû se tenir debout pour contribuer à la période post-indépendance ». Le but du scoutisme étant de « faire grandir des enfants pour qu’ils deviennent des adultes intégrés, responsables, tenant leur place dans la société et voulant laisser un monde meilleur », au fil des années, « les membres de la « Trive 1″ ont pris des responsabilités, ont été des constructeurs. Ils ont pris des rôles dans la diplomatie, la santé, le social, l’armée, l’enseignement, les Églises, les arts et la culture… » Avec toujours le souci de « faire le pont avec la culture française tout en cultivant l’identité malgache ». Certains sont aussi venus étudier puis s’installer en France, avec la même volonté de s’impliquer et de construire.

« Z’oeil de chouette », pont entre les Éclaireurs de France et de Madagascar

Célébrer le centenaire de la « Trive 1 » aux Batignolles, pendant que Madagascar va fêter le centenaire du scoutisme unioniste malgache, est donc plus qu’un retour aux sources. Cette paroisse était celle de Jean Beigbeder avant qu’il ne parte à Madagascar – et la figure de « Z’oeil de chouette » (son surnom chez les Éclaireurs), ou « Rabeigy » chez les Malgaches, devenu par la suite le premier président du Scoutisme Français, est encore aujourd’hui un pont entre les Éclaireurs des deux pays. La célébration sera d’ailleurs marquée par une conférence donnée par les auteures des « Lettres de Tananarive – Jean Beigbeder à son père » : Faranirina Rajaonah, professeure émérite d’histoire à l’Université Paris Diderot et membre du Cessma (Centre d’Études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques), et Claire-Lise Lombard, responsable de la bibliothèque du Défap, en particulier chargée de la valorisation des archives de la Société des missions évangéliques de Paris (1822-1971). Mais au-delà, cette célébration sera aussi l’occasion de retrouvailles pour plusieurs générations, françaises comme malgaches, qui ont été marquées par l’histoire de la « Trive 1 ». Une histoire qui a directement influé sur le parcours de familles venues de Madagascar pour s’établir en France : nombre d’anciens de la « Trive 1 » sont aujourd’hui « membres de l’EPUdF et s’y sentent chez eux. D’autres sont engagés dans les Églises protestantes malgaches en France, témoigne Chrystel Raharijaona. Ils sont devenus membres actifs, conseillers presbytéraux ou pasteurs, parce que leur histoire et leur éducation les poussaient à s’engager, là où ils sont. »

« Lettres de Tananarive » : retrouvez ci-dessous une interview des auteures pour « Madagascar Media »





Samy et l’apprentissage de la patience

En septembre 2016, Samy arrivait à Madagascar comme envoyé du Défap. Octobre 2023 : il y est toujours… Entretemps, sa vie a pris de nouveaux chemins. Parti pour enseigner le français à des élèves dans un orphelinat, il en est venu au fil des ans à concevoir un projet bien plus ambitieux : un manuel de pédagogie. Madagascar a en effet deux langues officielles : le malgache (ou malagasy) et le français. Le malgache est la langue du quotidien ; le français, celle des procédures, des lettrés, de l’enseignement supérieur… Sans maîtrise du français, pas d’ascension sociale. la langue est pourtant peu et mal enseignée dans les écoles malgaches. La FJKM et la FLM, Églises partenaires du Défap, dispensent des cours de français aux élèves qui fréquentent leurs écoles, mais manquent de moyens, notamment pédagogiques. Un vide que Samy s’est employé à combler, avec le soutien du Défap… Mais, comme il le raconte dans cette « lettre de fin de mission », sept ans après son arrivée dans la Grande Île, s’il a beaucoup enseigné, il a aussi beaucoup appris. Et découvert sur lui-même.

Samy lors d’une session de formation © Samy pour Défap

 

Téléchargez cette lettre de nouvelles en pdf

Les sept vies des « ça »

Ça déborde des quelques bacs à ordures dans la ville qui n’en sont que trop rarement débarrassés. Ça foisonne partout dans les rues, sur les trottoirs et dans la nature. Ça empeste et ça pollue. Ça, c’est tout ce que les Européens ou autres « développés » appellent des ordures, des déchets, des détritus. Mais ici, avant qu’on les relâche, il faut savoir qu’ils ont eu sept vies.

Quiconque vient à Madagascar est étonné de voir les longues rangées interminables de vendeurs de bibelots cassés, de bouteilles et pots en verre vides, de ferrailles en tout genre et autres camelotes. C’est qu’ici, il n’existe pas vraiment de poubelles puisqu’il n’existe pas vraiment de déchets.

Ce que nous appelons des déchets sont déchets-d’œuvre ici. Leurs objets d’artisanat sont faits de bouts de claquettes usées, de tubes de perfusion usagés ou du coton de pantalons troués. Les Malagasy ont élevé au rang d’art la réutilisation des déchets.

Vue d’une session de formation à l’usage du guide pédagogique développé par Samy © Samy pour Défap

 
Les Européens, les « développés », les riches, ont appris à ne se servir d’un objet que pour l’utilisation qu’on lui a donnée. À un enfant qui joue avec un carton comme cabane, on dit : « Ce n’est pas fait pour ça ! » et on le lui prend. Ici, les Malagasy ont bien compris la force créatrice du « ré-inventer ».

Ici, le journal n’est pas quotidien, il ne périme pas à la fin de sa journée, il se ressuscite en protège-cahier, en emballage de beignets et autres hors-d’œuvre de la rue.

Ici, les coques de pois de Bambara ou les morceaux de béton ne sont pas des débris, ce sont aussi des pions pour jouer dans la rue au « fanorona », jeu d’échecs du pays.

Ici, un pare-brise n’est pas que pour les voitures, c’est aussi la vitrine d’un vendeur pour protéger les beignets ou autre nourriture.

Ici, les feuilles des arbres ne sont pas que des feuilles, ce sont aussi l’isolant des toits ou des emballages de gâteaux traditionnels malagasy.

Ici, les conserves ne sont pas que des boîtes pour conserver la nourriture, ce sont les instruments de mesure nationale pour le riz ou les pois, ou encore des petites voitures avec des roues de bouchons de bouteille pour les petits enfants.

Ici, les sacs plastiques ne sont pas que des contenants, ce sont aussi des cerfs-volants de fortune attachés par quelques branches et épines, intrépides face au vent grâce à leur fil à recoudre.

Vue d’une session de formation à l’usage du guide pédagogique développé par Samy © Samy pour Défap

 
Tout objet a plusieurs vie, certains bien plus que les chats, avant de finir dans une décharge, qui sera encore, dépouillée de ce que l’on pourra encore en retirer. Et Madagascar est parfois une décharge à la taille d’un pays pour les Occidentaux qui se débarrassent de tout ce qui prend trop la poussière ; vêtements oubliés au fond du placard, manuel scolaire de latin, jouets défaillants et honte d’envoyer tout ça avec, sous une suie de bien-pensance et de bonne morale. Au lieu de culpabiliser d’avoir autant de déchets, on se donne bonne conscience de les « donner » à des plus nécessiteux que soi. Car bien souvent, ces objets sont bien plus jetés que donnés. Et Madagascar continue de les récupérer et de leur redonner des nouvelles vies.

À croire que Madagascar est un vaste dépotoir où il faudrait venir en seigneur pour y expliquer ce qu’il faudrait faire pour pouvoir la nettoyer de ces saletés. Car cela ne s’arrête pas aux déchets, mais ce sont aussi la culture, la façon de vivre, le « moramora » qui ont été dénigrés et remplacés.

Vue d’une session de formation à l’usage du guide pédagogique développé par Samy © Samy pour Défap

 

Être envoyé pour y apprendre

Encore et toujours, même depuis la fin du supposé colonialisme, des Européens, des Américains, des Japonais et tant d’autres de pays supposément développés viennent ici pour enseigner au Malagasy ce qu’ils doivent apprendre, ce qu’ils doivent faire et comment bien le faire. Mais moi, je me suis toujours demandé : et qu’est-ce qu’ils ont appris, eux, ici à Madagascar ? Est-ce qu’ils ont réussi à s’ouvrir assez pour apprendre à Madagascar ? Même lorsque je travaillais directement avec les enfants à Akanisoa, lorsque je leur enseignais le français, j’étais là à apprendre d’eux. J’apprenais ce que je ne savais plus en tant qu’adulte. Ce que la société m’avait appris à désapprendre. L’imagination, la joie simple du moment, la folie créatrice, le partage sans appréhension ni jugement. L’espace entier d’un moment, ne plus se soucier d’autre chose, ne pas avoir en arrière-pensée les choses que l’on doit faire après ou les règles qu’il faudrait suivre, mais simplement être présent. Avec eux, jouer ou apprendre, ou les deux en même temps, s’imprégner de son environnement et des personnes avec qui l’on est, participer et laisser libre cours à sa vivance. Beaucoup d’adultes vivent mais ne donnent que du morne autour d’eux.

Madagascar m’a appris et réappris bien plus que ça. Faire la liste complète de ce que j’y ai acquis dépasserait les deux pages imposées, cependant ce qui me vient en premier est le fait d’y être devenu pleinement un adulte et d’avoir retrouvé l’enfant en moi. De me sentir plein de mes différents « moi » qui peuvent s’exprimer librement selon le moment. L’adulte en qui on a confiance de donner des responsabilités et qui veut répondre à celles-ci et l’enfant qui retrouve ses jeux, les mots et de la complicité.

Vue d’une session de formation à l’usage du guide pédagogique développé par Samy © Samy pour Défap

 
J’ai essayé d’y vivre la sensation du temps cotonneux. Pas celui que l’on connaît en France et dont on ne donne qu’une certaine substance : cyclique et liquide. Ici, j’y ai appris que le temps peut être plus sirupeux et pourtant, on y prend goût quand on se laisse aller au « moramora ». Mais le temps peut aussi être celui, foudroyant, du non-retour, celui de l’instant gelé dont on se souviendra en brise froide. Vivre tous ces temps, les ressentir, permet d’apprendre ce que l’on ne connaît plus à force de courir sur place : la patience.

J’ai essayé d’y expérimenter la simplicité de la vie, contraire du confort, ce piège sournois et chaleureux qui touche tant de mes « congénères » qui se complaisent dans une vie qui ne leur donne qu’apparence et superficiel. J’ai dormi sur des « éponges » avec le dos collé à la dureté des planches, j’ai foulé du pied la nature au sol dur, j’ai sali mes doigts dans le charbon, j’ai lavé mes vêtements à la force de mes bras, j’ai tué de mes mains des poules pour en faire le prochain repas. J’ai vécu ce contact direct et parfois rude avec la vie, que les sociétés dites « développées » essayent de mettre à distance, distance de l’effort, distance de la souffrance, distance de la mort des animaux devenus nos viandes, distance du réel contact avec les autres où l’on se met en danger.

J’ai essayé d’y éprouver ce que cela fait d’être un « regardé ». Ne plus être un inconnu dans la rue, mais être un « différent » ou une proie au milieu des autres qui vous observent, qui vous épient, qui vous admirent. Et vous êtes absorbé par leur regard, vous êtes momentanément incapable de vous recentrer sur vos pensées parce que vous êtes interpellé par un cyclo-pousse, car un « vazaha » ne peut pas marcher à pied ; par des enfants ou adultes qui vous lancent des « vazaha » ou « bonjour vazaha » au mieux chaleureux, maladroits ; au pire moqueurs ; ou par ces regards inquisiteurs et qui vous jugent. Ce que je n’avais jamais pu sentir en France en tant qu’homme blanc hétérosexuel.

Vue d’une session de formation à l’usage du guide pédagogique développé par Samy © Samy pour Défap

 
J’ai essayé d’y apprendre à discerner l’apparence et la beauté. Les Malagasy portent un regard grave sur celles-ci et on pourrait les confondre. Est apparent ce que la société a donné comme possible à voir et à regarder ! Culte du corps, surtout féminin, et objectification de celui-ci. Le trait fin, l’absence de poil, ou plutôt leur épilation, et du far, du maquillage, des filtres, du « face play » pour cacher les rides, les impuretés, les boutons, pour apparaître selon le diktat de l’apparence. L’apparence de porter des vêtements coûteux, parfaitement lissés et immaculés le dimanche matin sans avoir de quoi manger le midi. La Beauté est, en opposition à l’apparence qui paraît, elle est, et reste toujours. Elle existe, quand l’apparence disparaît dans les rides et les vergetures, pourtant d’une beauté saisissante ! Elle est là dans les rides qui montrent les rires, dans un regard qui demande de la rigueur, dans les cicatrices, dans la différence. La Beauté existe dans chaque corps, pour qui sait regarder. Mais nous ne savons que rarement la voir.

J’ai essayé d’y parler, même si j’ai encore beaucoup de mal, ce langage particulier des Malagasy pour ne pas froisser les gens, un art de la conversation afin que chacun puisse rester digne en toutes circonstances, malgré ses torts ou ses maladresses.

Et il y a encore tellement de choses qu’offre une vie dans un nouveau pays et dont j’ai essayé de m’imprégner.

Et cette lettre de nouvelle de fin de mission n’est pas une lettre de fin puisque mon parcours ici continue et commence enfin à deux. Puisque ma « mission » va se poursuivre et le travail de formation et d’amélioration de la pédagogie et de l’enseignement dans les écoles primaires aussi. Je vais continuer à parcourir Madagascar pour y partager ce que j’ai appris et pour y apprendre à vivre.

Vue d’une session de formation à l’usage du guide pédagogique développé par Samy © Samy pour Défap