Une année avec les Actes des apôtres : méditation du jeudi 25 avril 2021. Cette semaine, nous prions avec notre envoyée au Burundi.

Nikolai Bodarevsky, Le procès de Paul (1875), musée ukrainien © Wikimedia Commons

Paul est citoyen romain, il a donc le droit de choisir la juridiction et le lieu où il sera jugé. En refusant d’aller à Jérusalem, il signifie que les autorités juives qui l’accusent n’ont pas le pouvoir de décréter la loi à laquelle il se soumet. En effet, ce n’est pas de loi religieuse qu’il s’agit ici, il ne s’agit pas d’un débat interne à la religion juive, mais de tout autre chose. En faisant appel à l’empereur, il choisit donc Rome. D’une certaine façon, c’est là que la vérité doit finalement être dite, c’est là qu’elle doit être révélée comme vérité.

Le nouveau gouverneur (Festus), qui a hérité du précédent (Félix) cet encombrant accusé, cherche à comprendre. Il est dans une position difficile : il ne peut se mettre à dos les autorités juives avec lesquelles il a tout intérêt à composer pour la paix de la province, mais il n’entend pas céder sur la légalité de la procédure. Arrivent alors deux visiteurs, le roi Agrippa (fils de l’infâme Hérode évoqué au chapitre 12 et petit-fils d’Hérode le grand qui a fait massacrer les innocents, cf Mt 2,16-18) et sa sœur Bérénice avec qui il entretient de troubles relations. Il est issu d’une famille au lourd passé, mais il connaît bien le monde juif et le gouverneur Festus met son hôte à contribution. Il commence par lui raconter ce qu’il comprend de l’histoire :

« Il y a ici, lui dit-il, un homme que Félix a laissé en prison. Lorsque je suis allé à Jérusalem, les grands-prêtres et les anciens des Juifs ont porté plainte contre lui et m’ont demandé de le condamner. Je leur ai répondu que les Romains n’ont pas l’habitude de livrer un accusé à la justice avant qu’il ait eu l’occasion, face à ses adversaires, de se défendre contre leurs accusations. Ils sont alors venus ici avec moi. Sans perdre de temps, j’ai pris place au tribunal le lendemain même et j’ai donné l’ordre d’amener cet homme. Ses adversaires se sont présentés, mais ils ne l’ont accusé d’aucun des méfaits auxquels je pensais. Ils avaient seulement avec lui des discussions au sujet de leur propre religion et d’un certain Jésus, qui est mort et que Paul affirmait être vivant. Pour ma part, je ne voyais pas comment procéder dans un tel cas, c’est pourquoi je lui ai proposé d’aller à Jérusalem pour y être jugé au sujet de cette affaire. Mais Paul a fait appel : il a demandé que son cas soit jugé par l’empereur. J’ai donc donné l’ordre de le garder en prison jusqu’à ce que je l’envoie à l’empereur. » Agrippa dit à Festus : « Je voudrais bien entendre moi-même cet homme. » – « Demain, tu l’entendras », répondit Festus. Actes 25,14b-22

 

Festus soulève plusieurs points importants : il rappelle d’abord qu’en droit romain, il faut qu’une accusation soit étayée pour qu’elle soit recevable, or il ne lui semble pas que ce soit le cas ici. Ensuite, il choisit délibérément de ne pas entrer dans la dispute : il lui semble qu’il s’agit d’un problème interne à un culte qui lui est complètement étranger à propos d’« un certain Jésus » dont on ne sait pas au juste s’il est mort ou vivant et manifestement il ne voit pas très bien le problème, ni d’un côté ni de l’autre.

Ces points seront repris dans le discours de Paul, qui s’annonce pour le chapitre suivant : l’accusation est-elle juste – en d’autres termes, où est la vérité de Paul ? Et ce point de doctrine sur la résurrection de Jésus est-il un simple détail dans un culte minoritaire, ou le point de bascule qui fera changer l’histoire ?

Sans le savoir, Festus a ouvert à l’argumentation de Paul ces deux points fondamentaux qui composent une question théologique articulée autour de deux notions complémentaires : la vérité et la résurrection. Il se trouve que le droit romain ne peut trancher cela, car il s’agit bien d’une question théologique. Il se trouve aussi que la loi juive ne peut trancher non plus, car, selon l’argumentation de Paul, elle a été dépassée par la grâce manifestée en Jésus-Christ. Il faut donc un autre cadre pour que la parole puisse être dite, pour que Paul, au lieu de répondre terme à terme, agression pour agression, aux accusations qui l’accablent, puisse déplacer le discours vers ce qui importe vraiment : la vérité de la grâce offerte, dans sa propre vie et pour le monde.

La scène s’ouvre, les personnages sont là, les paroles vont être prononcées, la question est posée…

 

Questions pour nous :

  • Dans le monde déchristianisé qui est le nôtre, les grandes questions théologiques n’ont pas disparu pour autant ; percevons-nous comment elles nous sont posées, là où nous ne les attendons pas forcément ?
  • Dans quel langage, autour de quelles questions non religieuses, les grandes questions de la foi se disent-elles aujourd’hui ?
  • Avons-nous des réponses toutes faites à ces questions ? Savons-nous où puiser les concepts, les images, les histoires pour dire aujourd’hui la vérité de notre foi ?

 

Prions :

Seigneur Jésus,
donne-moi la force de prendre des risques,
et surtout de prendre le risque de croire en toi
quand le monde m’entraîne dans l’autre sens ;
de prendre le risque de répondre
à l’agressivité par la douceur,
à l’égoïsme par la générosité.
Donne-moi d’entrer dans ta manière de voir.
Donne-moi de te ressembler le plus possible,
c’est ainsi que je pourrai être ton témoin
et un rayon de ta lumière.

Pascale Schneikert

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