Le pays est paralysé depuis le 7 février par une série de manifestations et de barrages : un mouvement, baptisé «Operation Lockdown Haiti», qui vise à contraindre le président Jovenel Moïse à la démission. En ce 20 février, la tension commence à peine à décroître et les habitants à ressortir de chez eux. Conséquences directes de cette crise : un blocage de toute l’activité économique et une aggravation des pénuries, qui n’épargnent ni les hôpitaux, ni les écoles. Le Défap, en lien notamment avec ses partenaires de la Plateforme Haïti, suit de près l’évolution de la situation.
Une rue de Port-au-Prince, septembre 2015 @ Défap

 

À Port-au-Prince, en ce 20 février, beaucoup d’habitants vivent encore cloîtrés à leur domicile. Se déplacer est difficile : les grands axes sont bloqués par des barrages. Depuis le 7 février, et le lancement de «l’Operation Lockdown Haiti» par des manifestants qui réclament la démission du président Jovenel Moïse, tout le pays tourne au ralenti. Même si les manifestations violentes des derniers jours marquent une accalmie dans la capitale haïtienne, les problèmes récurrents d’approvisionnement rendent le quotidien de plus en plus pesant. Des pénuries de carburant, d’eau, d’électricité… auxquelles s’ajoutent l’inflation qui fait grimper en flèche le prix des denrées de base : il y a quelques mois, un dollar américain équivalait à environ 71 gourdes (la monnaie haïtienne). Maintenant, c’est plutôt 85. Conséquence directe : un paquet de riz qui valait 35 gourdes se vend désormais à 60. Beaucoup d’Haïtiens ne peuvent tout simplement plus se nourrir.

Dans un rapport en date du 17 février, le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) dresse le bilan suivant : «Les blocages des routes, les manifestations et les dommages à certaines infrastructures, mairies, stations services, banques et marchés (le marché de la Croix-des-Bossales à Port-au-Prince a brûlé) ont entraîné l’arrêt partiel ou total des activités économiques (…) et impactent sérieusement le fonctionnement des services publics comme les hôpitaux, les maisons d’enfants, les prisons (…) Les écoles du pays ont été totalement fermées depuis le début de la crise (…) Plusieurs hôpitaux ont alerté l’opinion publique sur leurs difficultés d’approvisionnement (…) et certaines prisons font face à des ruptures de stocks de nourriture ou d’eau, de même que des maisons d’enfants.»

Appels à l’apaisement

Pour aller plus loin :

Le Défap, en lien notamment avec ses partenaires de la Plateforme Haïti, suit de près l’évolution de la situation. La Mission Biblique souligne ainsi l’étendue des troubles qui, au-delà de la capitale Port-au-Prince, paralysent les principales villes du pays : «Dans le Nord à Port-de-Paix [région déjà touchée par un séisme le 6 octobre], et Béraca (La Pointe des Palmistes) il n’y a plus de connexion internet depuis plus d’une semaine, les liaisons téléphoniques sont aussi difficiles et le manque de carburant pénalise fortement l’alimentation électrique avec les groupes électrogènes pour l’hôpital Béraca.»

Parmi les partenaires du Défap membres de la Plateforme Haïti, la FEPH (la Fédération des Écoles Protestantes d’Haïti) alerte tout particulièrement sur l’impact de ces troubles sur la scolarité des enfants. «Tous ces évènements, indépendants de la volonté de nos enfants», souligne la FEPH dans un communiqué, «entraînent de graves conséquences dans leur éducation et leur adaptation sociale. Alors que, l’éducation en situation d’urgence, de crise ou de post-crise, est envisagée à la fois comme un « outil de protection des enfants contre toute forme d’exploitations » et un dispositif essentiel pour « répondre aux besoins psycho-sociaux des enfants et véhiculer des messages de paix et de réconciliation », la FEPH lance un vibrant appel aux protagonistes afin de permettre aux enfants de reprendre effectivement le chemin de l’école dans les plus brefs délais.» Elle appelle à «créer un environnement respectueux des droits de l’enfant.»

En ce 20 février, la FEPH a toutefois pu reprendre ses activités et son personnel est en poste. France Volontaires souligne pour sa part que «de plus en plus de voix se font entendre au niveau de la société civile haïtienne pour appeler à l’apaisement», en notant «depuis lundi 18 février, une relative accalmie au niveau des manifestations ainsi qu’une reprise timide des activités sur Port-au-Prince.»

Le Défap et la Plateforme Haïti
Des liens privilégiés existent de longue date entre la Fédération protestante de France (FPF) et la Fédération protestante d’Haïti (FPH). Le passage de quatre tempêtes dévastatrices sur le territoire haïtien en 2008 (Fay, Gustav, Hanna et Ike) s’était traduit par la création de la Plateforme Haïti, regroupant divers acteurs du monde protestant sous l’égide de la FPF. En 2010, au moment du tremblement de terre qui devait faire plus de 230.000 morts, les réseaux protestants étaient donc bien en place, et la solidarité avait trouvé rapidement des canaux pour s’exprimer. Le président actuel de la Plateforme Haïti est le pasteur Rodrigue Valentin, de l’Église du Nazaréen, et sa coordination administrative est assurée par le Défap. La Plateforme rassemble les acteurs suivants :

 

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