Thomas Wild, pasteur de l’UEPAL et directeur de l’Action Chrétienne en Orient, intervient dans le cadre de la formation des envoyés du Défap, du 3 au 13 juillet 2017. Il anime un atelier sur le volet interreligieux et notamment la présence chrétienne en terre d’Islam.

En quoi ce volet de la formation est indispensable au futur envoyé ?
Depuis la révolution communiste, on s’est rendu compte que la religion jouait un rôle dans la vie quotidienne et que faire l’impasse sur ce sujet, comme le prétend la laïcité à la française, était impossible. Travailler avec des instances chrétiennes dans un pays musulman implique que l’on soit sensibilisé à la manière dont cette présence est perçue par les habitants du pays.
Cela s’exprime concrètement à plusieurs niveaux, dans la relation au bâtiment religieux par exemple, ou encore dans la relation homme-femme. De même, alors que l’attitude courante en France et en Europe est d’être dans la bienveillance vis-à-vis des religions, une telle attitude de neutralité positive est souvent peu compréhensible dans d’autres contextes. Nous sommes dans une famille religieuse qui par principe accueille la croyance autre car pour nous, si Jésus est la seule voie du Salut, nous ne mettons pas de limite à l’amour de Dieu pour les hommes.
Etre chrétien, être d’une religion, ce n’est pas seulement une opinion. C’est plus que cela : un comportement, une attitude éthique, une manière d’interagir avec le monde.

 

Quelle sera la plus grande difficulté que rencontreront nos envoyés ?
Sans hésitation, c’est la position du donneur de leçon, très tentante, qu’il faut combattre encore et toujours. Il faut éviter à tout pris de tomber dans ce travers facile et mettre tout en œuvre pour trouver un équilibre.
Il leur faudra apprendre à discerner ce qu’on peut faire positivement, cela implique une bonne compréhension de ses propres limites, et ce qui est acceptable par ceux qui les  entourent et les accueillent. Etre envoyé, c’est apporter son identité, ses croyances, sa manière d’être mais c’est aussi et surtout se laisser bousculer et admettre que l’occident n’a pas le monopole du développement.  Nous ne sommes pas propriétaire de la justesse des choses. Les envoyés devront admettre que nous avons aussi des leçons à recevoir : notre conception de la dignité humaine n’est pas partagée partout mais cela ne signifie pas qu’elle n’existe pas aussi là-bas, sous d’autres formes.

En fin de compte, de quoi sont porteurs ces envoyés ?
Peut-être que ce qui compte, c’est autant ce qu’ils apportent que ce qu’ils reçoivent.
Leurs présences, là-bas, dit notre volonté de vivre en paix, d’être acteur de la réconciliation. C’est un message d’amitié adressé aux peuples chrétiens du monde entier.
Et les envoyés reçoivent là-bas un formidable témoignage de la chaleur de l’accueil chrétien, un message d’espérance.
Lorsque tout semble aller mal et que nous partageons des moments spirituels, je sais alors que ce qui nous unit est plus fort que ce qui nous désunit.

 

Si nos envoyés ne devaient retenir qu’une chose de votre intervention ?
Toujours se souvenir que ce qui est évident pour moi ne l’est pas pour l’autre. Avant de juger, il faut toujours essayer de comprendre.
Notre histoire, notre lecture de l’histoire, est souvent éloignée de l’histoire telle qu’elle peut être lue par les autres peuples.

image_pdfimage_print