Johan : les défis du Tchad face au changement climatique

Le Tchad est l’un des pays les plus exposés aux risques de pénurie d’eau du fait du changement climatique. Johan s’est engagé dans un projet visant à former des habitants de zones arides à des techniques de forage manuel pour pouvoir creuser leurs puits de manière autonome. Voici sa première lettre de nouvelles, à l’issue de la session de formation des envoyés du Défap.

Johan lors de la session de formation des envoyés 2023 © Défap

 

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Après avoir passé un an au Tchad en tant que manager technique d’une station missionnaire, nous retournons en famille servir dans ce pays. Le Tchad est un pays fascinant au cœur du Sahel, enclavé dans le centre de l’Afrique. De nombreuses cultures se rencontrent au sein même du pays dans des paysages très variés : le désert aride, les plaines agricoles du Sahel et les terres argileuses subéquatoriales. Chaque région a ses avantages et inconvénients, mais dans son ensemble, le pays reste très peu développé. Comme il est enclavé au cœur de l’Afrique, peu de matériaux y transitent, ce qui fait qu’il se développe plus difficilement que les pays côtiers voisins comme le Cameroun, le Nigéria ou le Soudan.

Aggravé par le changement climatique, les habitants de certaines régions du Tchad se retrouvent en manque d’eau pendant la saison sèche. L’eau de surface se fait rare, il faut aller la puiser profondément. Pour cela, il faut faire des forages de puits. La région du Salamat, dans le Sahel, est très touchée par ce phénomène à tel point que 15 ans auparavant seulement 35% de la population avait accès à l’eau potable. La mission américaine TEAM a donc commencé à creuser des puits dans cette région. J’ai pu les rencontrer les derniers mois de mon premier terme pour découvrir les procédés de forage et analyser le besoin. Une grande partie des puits commencent à vieillir et ont besoin de maintenance. La plupart du temps les puits en dysfonctionnement sont juste abandonnés et les habitants retournent à leurs anciennes méthodes – et donc à l’eau de surface contaminée bactériologiquement – ou migrent vers d’autres villages. Devant un tel besoin, je suis très motivé à repartir pour faire le suivi des puits réalisés et entreprendre un travail de maintenance.

Johan lors de la session de formation des envoyés 2023 © Défap

À terme, la mission a pour projet de former des tchadiens à des techniques de forage manuel afin de devenir autonome dans la région. Une technique manuelle nigériane a déjà été testée dans différents types de sol et toute une région semblerait propice à son utilisation. Ce procédé à moindre coût permettrait aux populations locales de ne plus dépendre des moyens mécanisés venant de l’occident. Il en est de même pour la formation de techniciens de maintenance qui par leur travail pourrait pérenniser le bon état des puits sans notre présence.

Le projet de développement s’inscrit dans le cadre d’un Volontariat de Solidarité International en partenariat avec le Défap, où je suis actuellement en formation au départ. Cette formation m’a permis de me former sur des nouveaux sujets comme l’interculturalité, la géopolitique et l’anthropologie, qui m’ont amené à une meilleure compréhension des relations entre les peuples. Il était très intéressant de passer du temps avec d’autres envoyés de différents pays et d’entendre leurs témoignages de vie. Nous avons pu partager un bon nombre de connaissances et s’encourager mutuellement. Maintenant il n’y a plus qu’à préparer le départ, le mois prochain.

Johan lors de la session de formation des envoyés 2023 © Défap




Au service des enfants handicapés

Natalie, kinésithérapeute, est partie six ans au Tchad avec comme objectif de travailler à améliorer la vie des enfants handicapés.

Sans ce petit bout de femme, le centre de kinésithérapie de Bitkine n’aurait jamais vu le jour. Il lui a fallu toute son énergie, pour ne pas dire son opiniâtreté, pour arriver à ses fins. Alors qu’elle venait d’effectuer un séjour d’une année au Burkina Faso, lui vient une idée : développer la kinésithérapie dans un pays où les praticiens se comptent sur les doigts d’une seule main, et travailler auprès des personnes handicapées. En cela, elle est doublement pionnière.

 

Natalie Metz

Natalie Metz (Source : ASMAF)

 

Natalie Metz décide donc de partir dans le cadre d’un VSI (volontariat de solidarité internationale). Le projet est monté avec une Église locale, l’AET (Assemblées Évangéliques au Tchad) et le soutien du Défap dans le cadre de son partenariat avec l’ASMAF (Association de Soutien des Missions des Assemblées de France).

 

Seule, mais avec une détermination sans faille, elle débute dans un petit dispensaire, où elle forme des kinésithérapeutes. Puis, avec l’aide d’une équipe locale, part pour Bitkine, une petite ville au centre du Tchad. Les édiles locaux ont créé un centre hospitalier, c’est lui qui va accueillir l’espace dédié à la kinésithérapie monté par Natalie. Ouvert à tous, il accueille encore peu de personnes handicapées, et encore moins d’enfants alors que ces derniers ont besoin plus que quiconque de ce type de soins.

 

Un investissement « holistique » !

 

Dès son arrivée, Natalie, tout à son souci d’intégration et de respect des autres, décide d’apprendre l’arabe dialectal tchadien, la langue véhiculaire utilisée par près de 80 % de la population. En outre, elle va passer près de cinq moins à N’Djamena, la capitale, pour s’imprégner de la culture et du mode de vie du pays. Une fois de retour à Bitkine, elle pourra ainsi mieux s’intégrer et établir des relations de confiance rapides et fortes avec ses patients. 

 

Natalie avec un patient 

Natalie avec un patient (Source : ASMAF)

 

Le Tchad compte à peine six ou sept praticiens, mais Natalie ne considère pas cela comme un obstacle. Pourtant, sensibiliser une population qui n’a pas la moindre idée de ce qu’est la kinésithérapie demande un sacré courage, voire une bonne dose d’inconscience !

« Le plus gros frein, c’est l’ignorance, explique Natalie. Les gens ne connaissent pas la kiné, ils ne savent donc pas ce que ça peut apporter. Ils l’utilisent en dernier recours alors que les résultats ne sont pas immédiats. Les gens doivent me faire confiance sur le long terme et ça, ce n’est pas évident ».

 

Et qui dit kinésithérapie dit massage. Or, le rapport au corps est sans doute un des chapitres les plus codifiés par les religions et les cultures. Comme on peut l’imaginer : aucun homme n’aurait accepté que son épouse soit touchée par un homme. Pour pallier toute éventualité, Natalie Metz a donc recruté un homme et une femme.


Le handicap : un tabou persistant

 

Venir en aide aux personnes handicapées n’est pas chose facile dans un pays comme le Tchad, où il règne une sorte de tabou autour du handicap. Dans la plupart des familles, on prend soin des enfants handicapés, mais on a honte de les montrer car ils sont considérés comme victimes d’un mauvais sort, ou habités par le Malin. Sans compter qu’ils sont une charge car ils ne peuvent pas travailler. L’appareillage est inexistant, tout comme les aides sociales. Les parents ont donc toujours été un peu étonnés de l’attention que pouvait leur porter Natalie. Bien sûr, le suivi de ces jeunes patients n’est pas évident. Les distances sont grandes et constituent un obstacle considérable. Natalie aurait aimé mettre en place un système de visite à domicile, mais…

 

Natalie avec un enfant handicapé

Natalie avec un enfant handicapé (Source : ASMAF)

 

Natalie Metz essaye de maintenir l’espoir d’une amélioration de la situation des handicapés auprès des populations locales mais, pour beaucoup, la guérison n’est pas au bout du chemin. Au moins pourront-ils vivre dans un certain « confort ».

 

Aujourd’hui, Natalie est rentrée en France mais ses deux auxiliaires vont assurer la suite. Elle retournera sur place deux fois par an pour les questions de formation et de conseil. Et s’occuper de l’épineuse question de la logistique depuis la France lui semble être une mission tout aussi indispensable.

 




Attentats au Tchad : situation des envoyés

N’Djamena, capitale du pays, a été touché par plusieurs attentats-suicide le lundi 15 juin dans la matinée.

Au moins quatre explosions ont retenti, hier 15 juin, dans le secteur de la Direction de la Sécurité publique et du Commissariat central ainsi que vers l’école de police, des endroits stratégiques et proches du pouvoir.

Ces attentats-suicide auraient fait vingt-sept morts, dont les quatre kamikazes, et plus de cent blessés. Ils ne sont pas encore revendiqués, mais les autorités soupçonnent fortement le groupe terroriste nigérian Boko Haram. En effet, près de cinq mille soldats tchadiens sont actuellement engagés dans la force sous-régionale qui lutte contre ce mouvement au Nigeria, au Niger et au Cameroun, et N’Djaména devrait bientôt servir de base à son état-major.

 

Carte du Tchad (Source : Google Maps)

 

Le Défap a quatre envoyés dans la capitale tchadienne. Ils vont bien et sont en contact permanent avec l’ambassade de France pour les questions de sécurité et limitent, dans la mesure du possible, leurs déplacements en ville.

Les communications téléphoniques sont perturbées mais ils ont pu entrer en contact avec leurs proches, avec le Défap ainsi qu’avec leur association porteuse.

Les mesures de contrôle ont été intensifiées en ville et chacun reste vigilant.

Les prières de nos communautés et de nos Églises sœurs vont vers les Tchadiens et tous les résidents de ce pays.