Marie-Bénédicte Loze est envoyée du Défap en Haïti depuis un an et demi. Elle revient sur son parcours, ses motivations et les convictions acquises lors de son expérience.
Marie-Bénédicte est envoyée auprès de la Fédération des Ecoles Protestantes de Haïti (FEPH). Elle est chargée d’appui aux partenariats : conception des projets et recherche de bailleurs de fonds sont ces principales missions. Elle note les besoins et rédige des projets, tout en cherchant les financements nécessaires à leur mise en place, et les lance avec une équipe.
Marie-Bénédicte Loze lors d’une intervention dans une école sur la gestion des risques et des désastres, DR
Deux raisons ont motivé cette décision. Partir à l’étranger, c’était d’abord pour elle une manière d’ « élargir son horizon tout en apprenant de l’autre ». Et puis, elle ressentait une attirance forte pour Haïti. Elle avait effectué de la traduction auprès de missionnaires américaines présents sur place. Elle s’était engagée encore un peu plus lors du séisme de 2010 en participant à des levées de fonds.
La FEPH regroupe plus de 3000 écoles et possède des bureaux dans différents départements. Elle œuvre pour améliorer la qualité de l’éducation dans le pays et fait du lobbying auprès du ministère de l’éducation nationale et de la formation professionnelle haïtien afin qu’il respecte ses engagements. Et il reste encore du chemin à faire : seul 12% des écoles sont publiques en Haïti.
Elle travaille avec une équipe locale, dont la taille varie selon l’ampleur des projets à mener. Cette forme de collaboration est essentielle pour rester connecté au terrain.
Un engagement sur le long terme
Le Défap soutient la FEPH au travers du poste de VSI occupé par Marie-Bénédicte. Cette aide est précieuse pour la structure, les défis sont nombreux. « Ce poste va être pérennisé sur dix ans », indique-t-elle.
Plusieurs projets sont en cours, tous ayant pour but d’améliorer la qualité de l’éducation sur place : renforcement de l’enseignement autour de la lecture et de l’écriture, formation de directeurs et professeurs (peu formés sur place), construction de blocs sanitaires…
Un projet lui tient particulièrement à cœur : une formation à la gestion des risques et des désastres.
Le principe consiste à simuler des tremblements de terre pour apprendre aux enfants comment réagir lors d’une catastrophe naturelle, principalement les séismes et les inondations. Tout le monde a été victime du séisme. Personne n’a été épargné, chaque famille a eu son lot de proches disparus. Ce traumatisme reste vif et porte en germe un questionnement et une implication forte. Il n’est pas question de ne rien faire et d’attendre que le passé se répète.
Marie-Bénédicte Loze lors d’une intervention dans une école sur la gestion des risques et des désastres, DR
Les besoins autour de ce projet sont immenses. La FEPH travaille directement avec les écoles : elle forme les professeurs qui interviennent auprès des élèves et organise les simulations pour leur apprendre concrètement comment réagir. Un système d’alerte a été mis en place : à chaque type d’alerte correspond une catastrophe – cela se fait en général au sifflet, les écoles ne possédant pas d’alarme. La FEPH leur apprend ainsi les bons gestes à adopter, mais elle demande aussi à un ingénieur d’analyser les lieux pour faire un plan d’évacuation et repérer les endroits dangereux dans l’école, pour en informer les élèves.
« Je me suis beaucoup investie dans ce projet. J’ai formé des encadreurs pédagogiques et organisé des simulations avec les enfants. A la sortie de l’école, quel que soit leur métier, les élèves sauront comment réagir face à une catastrophe : c’est un apprentissage qui leur servira toute leur vie. »
Cette formation touche également les écoles hors du réseau FEPH.
La nécessité d’une approche globale
Le problème de l’approche dite par projets, c’est que lorsque le projet s’arrête, tout ce qui l’accompagne risque, par manque de moyen, d’être suspendu.
Mieux vaut investir dans une structure, qui permet de pérenniser les projets. Et c’est dans cette approche que le Défap, avec l’envoi de personnes, s’inscrit. Il est nécessaire de participer au frais de fonctionnement, les structures locales s’en trouvent renforcées. Et puis, pour faire du développement, il faut écouter les hommes et les femmes qui vivent sur place, comprendre leurs besoins, et leur faire confiance.
« L’aide du Défap compte vraiment, ajoute-t-elle, c’est une chance [pour la FEPH] que le Défap soit un partenaire pérenne et non un simple bailleur de fonds finançant des projets ponctuels. »
La FEPH travaille avec de nombreux organismes nationaux, mais aussi internationaux, qui interviennent dans le domaine de l’éducation. Elle coordonne également une plateforme qui regroupe une quarantaine d’ONG.
Une expérience enrichissante
Marie-Bénédicte est très heureuse de son expérience : elle lui a permis de découvrir le Défap, de rencontrer d’autres envoyés, qu’elle considère comme une seconde famille.
La Mission lui a permis de faire de vraies rencontres, à Paris et en Haïti. Par exemple avec le directeur exécutif de la FEPH, M. St Fort dont elle dit qu’: « il a des qualités professionnelles et humaines extraordinaires. Il porte une vraie vision, une volonté de changer les choses et d’améliorer les conditions de vie dans le pays, sans aucun intérêt personnel en vue ».
« C’est une chance pour nous, les envoyés, de mettre nos compétences au service d’une structure. » Mais l’essentiel ne réside pas là. Ce qu’ils retiennent de ce genre d’expérience, c’est la part d’humanité qu’ils ont pu partager avec ces autres qui les accueillent : « ils nous donnent plus que nous ne leur apportons ».