Éric de Putter © Défap

Plus de deux ans après l’assassinat d’Éric de Putter, le 8 juillet 2012 à Yaoundé, les questions soulevées par cette mort restent sans réponse satisfaisante. Les lenteurs de la justice suscitent l’incompréhension non seulement en France, où l’ensemble de la communauté protestante a été frappée par les circonstances de cette disparition, mais aussi au Cameroun, et notamment sur le campus de l’Université protestante d’Afrique centrale, où a eu lieu le drame. A Paris comme à Yaoundé, les autorités sont interpellées pour qu’enfin l’enquête progresse.

Du côté français, le président et le secrétaire général du Défap ont été reçus le 5 novembre au ministère de la Justice. Outre un proche conseiller de la Garde des Sceaux, ils ont pu échanger notamment avec un représentant du BEPI (Bureau de l’Entraide Pénale Internationale), un représentant de la Direction des Affaires criminelles et des grâces, et un représentant de la Direction des Affaires Européennes et Internationales. Cette rencontre s’inscrivait dans la suite d’une réunion organisée le 23 juillet dernier. Le Défap  avait alors transmis aux services de la garde des Sceaux un dossier complet rappelant les conditions de la mort d’Éric de Putter, ainsi que les démarches entreprises depuis plus de deux ans.

Le parcours des commissions rogatoires

Le président et le secrétaire général du Défap ont reçu confirmation de l’attention portée par l’administration française à l’avancée de l’enquête sur l’assassinat d’Éric de Putter. Mais le ministère de la Justice doit bien constater que ses demandes n’ont pas reçu de suites de la part de l’administration camerounaise.

Dans les cas d’enquêtes impliquant deux pays et deux systèmes judiciaires, les procédures sont complexes. Les juges d’instruction ne peuvent agir directement à l’étranger et doivent émettre des demandes officielles d’entraide judiciaire. Une double enquête ayant été lancée, à la fois en France et au Cameroun, deux commissions rogatoires internationales ont été émises, l’une par un juge français, l’autre par un juge camerounais.

Dans un cas comme dans l’autre, la demande émise par le juge doit être transmise au procureur, puis au procureur général, puis au ministère de la Justice ; elle doit ensuite passer par le ministère des Affaires étrangères afin d’être transmise à un autre pays. Là, elle doit effectuer un parcours inverse jusqu’à aboutir chez le juge d’instruction.

« On ne peut pas oublier »

Dans le cas de la demande française, les services de la Garde des Sceaux ont eu confirmation qu’elle était bien parvenue au ministère des Affaires étrangères au Cameroun. Mais pas de nouvelles au-delà ; tout ce que l’on sait à ce jour est qu’elle n’a pas été suivie d’effets. De même, dans le cas de la commission rogatoire camerounaise, la demande a bien été émise par le juge, mais n’est pas parvenue à la justice française ; elle reste donc bloquée côté camerounais, sans que l’on sache au juste à quel niveau.

Du côté des Églises camerounaises et des autorités de l’Université protestante d’Afrique centrale, on s’efforce aussi d’obtenir des réponses. Sans succès, pour l’instant. « On se heurte à un mur », reconnaît un responsable du Conseil d’administration de l’UPAC en évoquant, de passage à Paris, de vaines démarches auprès des autorités judiciaires. L’émotion est toujours vive à l’UPAC, chez les anciens étudiants d’Éric de Putter comme au sein du corps enseignant. « Il était impliqué dans toutes les activités de l’UPAC », se souvient le recteur, Timothée Bouba (écouter son témoignage audio ci-dessous). « On ne peut pas oublier (…) tous ses étudiants continuent à prier pour la famille ». Nicodème Alagbada, nouveau président du Conseil d’Administration de l’UPAC (écouter son témoignage ci-dessous), souligne pour sa part que la promotion 2013 de la Faculté de théologie a été baptisée « promotion Éric de Putter », pour « garder en mémoire ce professeur qui constitue pour nous un symbole de courage ».

Témoignages audio

Nicodème Alagbada : « Nous déplorons le silence de la justice »

Nicodème Alagbada : « Son souvenir inspire le respect »

Timothée Bouba : « Ses étudiants prient pour que lumière soit faite »
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