Courrier de mission – Le Défap : Karen Smith et l’Église évangélique au Maroc
Retour sur « Courrier de mission – Le Défap » , une émission désormais présentée par Marion Rouillard sur Fréquence Protestante. En ce mois de novembre, elle a interviewé Karen Smith, aumônier de l’université d’Ifrane et présidente de l’Église évangélique au Maroc.
Karen Smith © F. Lefebvre-Billiez pour Défap« Courrier de mission – Le Défap » , l’émission mensuelle du Défap diffusée sur Fréquence Protestante, évolue : elle est désormais présentée par Marion Rouillard, qui nous emmène à la rencontre des partenaires du Défap. Elle donnera ainsi la parole à celles et ceux qui vivent la mission, soit dans diverses communautés ecclésiales entretenant des liens avec le Service protestant de mission, soit en tant qu’envoyés du Défap : autant de manières de vivre la rencontre, par-delà les distances géographiques et culturelles.
Karen Smith et l’Église évangélique au Maroc«Courrier de mission – le Défap» du 17 novembre 2021.Émission consacrée au Défap, animée par Marion Rouillard sur Fréquence Protestante |
Pour cette émission du mois de novembre, la première invitée de Marion Rouillard était Karen Thomas Smith. L’occasion tout d’abord d’évoquer le parcours singulier de cette Américaine née dans une famille baptiste du Kentucky, qui est aujourd’hui aumônier de l’université d’Ifrane, au Maroc. Elle est également présidente de l’EEAM, l’Église Évangélique Au Maroc – une communauté membre de la Cevaa – Communauté d’Églises en mission, dont les membres d’origines très diverses font cohabiter des branches très différentes du protestantisme.
À son arrivée au Maroc, Karen Smith ignorait tout de l’EEAM : elle était venue dans ce pays avant tout pour trouver un lieu où exercer son ministère sans être séparée de son mari, enseignant de haut niveau en informatique et baptiste comme elle. C’est ainsi qu’ils avaient appris, en 1995, l’existence d’un projet du roi Hassan II de créer de toutes pièces un campus à l’américaine au milieu des montagnes du Moyen Atlas : l’université Al Akhawayn d’Ifrane. Au Maroc, « j’ai d’abord été accueillie et encouragée par l’Église catholique », se souvient ainsi Karen Smith, témoignant au micro de Marion Rouillard. « Puis au fur et à mesure, j’ai découvert l’Église évangélique au Maroc (…) C’est Jean-Luc Blanc [alors président de cette Église, ndlr] qui a fini par me recruter pour donner un coup de main ».
Les défis de l’EEAM
Car l’EEAM avait alors un grand défi à surmonter : le manque de pasteurs. « En 2002, rappelle Karen Smith, nous avions dix paroisses. Mais il n’y avait que deux pasteurs pour tout le Maroc. L’un était issu des ADD [les Assemblées de Dieu, ndlr], l’autre avait été recruté par la Ceeefe », la Communauté des Églises protestantes francophones (anciennement la Commission d’Églises Évangéliques d’Expression Francophone à l’Étranger). Pour la petite communauté de l’EEAM, la Ceeefe représentait, et représente encore, l’ouverture au monde, le lien avec les autres Églises – y compris les Églises françaises. Mais face à ce manque criant du corps pastoral, il a fallu innover… Six ans après son arrivée au Maroc, Karen Smith a ainsi été reconnue comme pasteur au sein de l’EEAM. Puis, il a fallu trouver le moyen de former de jeunes pasteurs sur place : c’est ainsi que s’est développé le projet de l’Institut œcuménique de théologie Al Mowafaqa, en lien avec l’Église catholique, avec une approche unique du dialogue entre le christianisme et l’islam. Outre les étudiants de divers pays qui y viennent, l’Institut permet désormais à l’EEAM d’avoir ses propres pasteurs formés au Maroc. « En 2017, rappelle ainsi Karen Smith, une première promotion a été diplômée : nous avons consacré cinq jeunes pasteurs, dont une femme ; depuis lors, nous avons consacré quatre autres ».
Autre défi pour l’EEAM : accueillir la diversité du protestantisme. À l’origine, l’EEAM avait pour nom « Église réformée évangélique au Maroc », et ses paroissiens étaient essentiellement européens. Mais après une longue période de décroissance dans les années ayant suivi l’indépendance du Maroc, elle a vu de nouveau le nombre de ses fidèles augmenter à partir des années 1990. Aujourd’hui, c’est une Église en croissance ; elle est passée de dix paroisses en 2002, à onze aujourd’hui… mais avec une sociologie qui a beaucoup évolué. Les nouveaux paroissiens viennent pour beaucoup d’Afrique subsaharienne. Nombre d’entre eux sont des étudiants venus à l’université au Maroc. « Ils sont issus de toutes sortes d’Églises protestantes, souligne Karen Smith. Majoritairement, plutôt des Églises de Réveil, des Églises pentecôtistes ; mais il y a aussi des baptistes, des méthodistes, des paroissiens qui nous viennent d’Églises luthéro-réformées… Et notre défi, c’est de faire Église ensemble ».
Depuis longtemps proche du Défap, qui soutient son ministère au Maroc, Karen Smith effectue de manière régulière des visites en France pour y évoquer auprès des Églises françaises son expérience de l’interreligieux. Ce qu’elle fera courant 2022, avec un nouveau voyage en France qui lui donnera l’occasion d’animer une conférence au Défap avant d’effectuer une tournée en Alsace.