Alors que le Congrès de Nouvelle-Calédonie est appelé à se prononcer sur la transcription juridique de l’accord trouvé le 3 novembre lors du Comité des signataires à Matignon, marquant une nouvelle étape vers l’organisation d’un référendum d’autodétermination attendu par certains et redouté par d’autres, l’Église Protestante de Kanaky Nouvelle-Calédonie (EPKNC) s’efforce de faire passer un message d’apaisement. Ce qui se traduit à la fois dans le mot issu de son dernier synode, et dans son appel à une «Semaine de prière pour la paix dans le pays et pour toute l’année 2018», placé sous ce thème issu d’Éphésiens 2,19 : «Concitoyens d’un pays nouveau».

Délégation de la Nouvelle-Calédonie Clôture du 4ème festival des arts mélanésiens, Mwâ kâ Nouméa, Nouvelle-Calédonie 2010 © Sekundo

Le processus qui doit conduire, d’ici novembre 2018, à organiser un référendum d’autodétermination en Nouvelle-Calédonie a franchi une étape décisive le 3 novembre dernier lors de la seizième réunion du Comité des signataires à Matignon. Au bout de plus de 9 heures de discussions, un accord a pu être obtenu sur les listes électorales, levant les divergences portant sur l’inscription automatique de 11.000 personnes supplémentaires sur ces listes – 7000 de statut civil coutumier (kanak) et 4000 de statut civil de droit commun. La prochaine étape doit se dérouler le 23 novembre devant le Congrès de Nouvelle-Calédonie, assemblée d’élus issus des trois provinces, dont les 54 membres vont être appelés à donner leur avis sur le projet de modification de la loi organique de l’accord de Nouméa transmis par l’État, et qui constitue une traduction juridique de l’accord électoral du 3 novembre.

Au cours de ce processus complexe, l’établissement de la confiance est essentiel afin d’éviter les risques de contestations du futur référendum. Au cours de la seizième réunion du Comité des signataires, le Premier ministre Édouard Philippe, qui est attendu en Nouvelle-Calédonie du 2 au 5 décembre prochains, a voulu précisément prendre le temps d’établir un vrai dialogue. Ce qui n’a pas empêché des divergences parmi les indépendantistes : Louis-Kotra Uregei, un des leaders du Rassemblement Indépendantiste et Nationaliste (RIN), qui regroupe plusieurs formations séparatistes minoritaires, a ainsi contesté les chiffres communiqués au Comité des signataires, «n’excluant pas un boycott du référendum».

«Concitoyens d’un pays nouveau»

Pour aller plus loin :
Nouvelle-Calédonie : faire du référendum un choix d’espérance
Nouvelle-Calédonie et protestantisme français : tisser des relations proches
ABS : Un programme de soutien aux étudiants de Nouvelle-Calédonie

Face à tous les risques de tensions avant et, surtout, après le référendum, l’Église Protestante de Kanaky Nouvelle-Calédonie (EPKNC) s’efforce de faire passer un message d’apaisement. À travers le mot issu de son dernier synode, publié au cours du mois de novembre, elle «encourage chaque citoyen, jeune, vieux, femme et homme, durant cette période de consultation à engager une démarche porteuse d’espérance afin de donner force à un peuple qui cherche un avenir dans la paix et la liberté.» En ajoutant que «cette préparation à la consultation engage le peuple de Dieu à être responsable, digne et ouvert pour que le choix soit un acte de construction quel qu’en soit le résultat.»

Cette démarche est essentielle de la part de l’EPKNC, constituée en grande majorité de Kanak et qui avait, dès les années 70, souligné les aspects néfastes de la colonisation. Elle encourage aujourd’hui ses membres à une démarche d’accueil de l’autre dans sa diversité, en insistant sur l’aspect multiculturel que présente désormais la population néo-calédonienne. Ce qui se retrouve dans son appel à une «Semaine de prière pour la paix dans le pays et pour toute l’année 2018», placé sous ce thème issu d’Éphésiens 2,19 : «Concitoyens d’un pays nouveau».

«L’année 2018, souligne ce texte diffusé par la Commission Théologique de l’EPKNC, sera pour la Nouvelle-Calédonie une année décisive. Le pays va entrer dans une ère nouvelle de son histoire. Un temps fort où des choix et des décisions politiques importantes seront prises. L’Église (EPKNC) a une forte responsabilité dans l’accompagnement de ce processus. Elle a confiance en ses leaders politiques, qui ont la lourde tâche d’amener les débats de société vers la découverte d’une démocratie de partage de reconnaissance et de rééquilibrage. L’Église souhaite qu’ensemble avec nos autorités administratives et coutumières nous valorisions notre pouvoir créatif et notre force d’adaptation face aux nouvelles contraintes et pressions subies par notre pays en pleine mutation.»

«La Kanaky-Nouvelle-Calédonie, notre trésor et notre richesse»

Ce texte présente tout d’abord la Nouvelle-Calédonie, son histoire et le rôle des Églises, avant d’inviter à dépasser les clivages entre communautés en s’appuyant sur l’appel de Paul : «Par sa grâce Dieu intègre tous les hommes et les femmes à devenir « concitoyens » de son Royaume. Cette communauté nouvelle est fondée sur des nouvelles bases, par des outils et des ouvriers nouveaux. Cette communauté est composée de juifs et de non-juifs, de chrétiens et de non-chrétiens. Bâtir cette maison signifie : apprendre à se renier soi-même, quitter ses habitudes et ses traditions, et réfléchir sur une nouvelle conception du partage et de l’unité dans les profondeurs de la diversité humaine. La vision du « destin commun » engage toutes les communautés chrétiennes de notre pays, à réfléchir et à mourir pour qu’une nouvelle identité émerge des cendres de la violence. Ce processus vise une identité mature capable de dépasser les crises et les perturbations, il développe par ailleurs la capacité d’ouverture et de responsabilités du citoyen dans la construction d’un avenir commun.»

«La Kanaky-Nouvelle-Calédonie, insiste encore ce texte de la Commission Théologique de l’EPKNC, c’est la « grande case » que nos aînés ont bâtie sur les fondements de respect, d’humilité et de tolérance. C’est dans cette nouvelle alliance que tous les enfants de ce pays doivent s’unir. Elle est notre « trésor » et notre richesse. L’Accord de Nouméa qui en est issu, a fait de notre communauté humaine, une singularité plurielle pour développer une nouvelle expression culturelle.»

Les rendez-vous du Défap de 2017 – 2018 :
  • Août 2017: participation des Secrétaires généraux du Défap et de la Cevaa au Synode général de l’Église protestante de Kanaky Nouvelle-Calédonie (EPKNC) à Lifou, îles Loyauté ; visite du lycée protestant Do Neva et du chantier de réhabilitation après les inondations catastrophiques de novembre 2016.
  • 18 septembre 2017 : soirée publique de conférence au siège de la Fédération protestante de France à Paris sur le thème « la Nouvelle-Calédonie à la croisée des chemins ».
  • Septembre 2017 – juillet 2018 : animations dans les paroisses protestantes de métropole, autour des défis que vit la Nouvelle-Calédonie à la veille du référendum et de la place du protestantisme calédonien.
  • Juin 2018 : visite en France d’une délégation de Nouvelle-Calédonie et de l’EPKNC pour participer à des conférences dans toute la France et rencontrer les nouvelles autorités politiques françaises.
  • Automne 2018 : visite en Nouvelle-Calédonie, avant le référendum de novembre 2018, d’une délégation du protestantisme français.
 

 

image_pdfimage_print